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               LE PAGE DU BARON DES ADRETS.              331
tenant d'une main pareillement une torche et de l'autre
une barre de fer, arme aussi redoutable, en cas de dan-
ger, que la longue épée qui pendait à son côté.
   Tous deux pénètrent sous la voûte, dont les échos s'é-
veillent en gémissant, et dont les ténèbres disparaissent à
la clarté des torches fumeuses qu'ils appliquent'contre la
muraille.
   Polidino dépose sa boîte sur la tombe d'un abbé,
l'ouvre, en retire divers flacons, puis, joignant ses efforts
à ceux du baron, soulève, avec la barre de fer, la pierre
qui recouvrait le dernier moine enterré.
   Sous la pression des deux sacrilèges, la pierre pesante
glisse à côté de la tombe et laisse voir les vêtements, les
mains jointes et le visage pâle d'un religieux.
   Les chairs n'étaient pas décomposées, les vêlements
étaient intacts ; Polidino les arrose d'une liqueur péné-
trante et subtile que contenait un flacon de cristal fermé
avec soin dans un étui d'argent.
   Une odeur pénétrante se répand dans le caveau, chasse
les miasmes impurs et, plus puissante que l'encens, plus
enivrante que le vin, excite le cerveau des deux crimi-
nels, trouble leurs sens et donne à leur courage une exal-
tation fanatique capable de leur faire braver tous les périls.
   Pendant que le baron attache des regards ardents sur
la figure immobile du moine, Polidino allume un réchaud,
met dans un vase de cuivre des liqueurs qu'il mélange
en murmurant des paroles. Bientôt la fumée s'éleva obs-
curcissant l'air du caveau, et, fut-ce une illusion, il sem-
bla au baron dont le cœur ne put s'empêcher de battre,
qu'à travers le nuage qui enveloppait le tombeau violé,
il avait vu frémir le mort.