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TROIS MOIS AU-DELA DES ALPES. 515 À Home, nulle gêne , nulle contrainte , chacun va où bon lui semble et personne ne s'en inquiète. On pénètre dans les palais des grands seigneurs et des cardinaux comme chez soi. Dans les ce'rémonies publiques, on les coudoie, on les salue au milieu d'une haie de gardes qui présentent les ar- mes à leur passage, sans avoir l'air de songer, le moins du monde, si vous devez ou non prendre votre part a tous ces honneurs d'usage. Vraiment on dirait que la terre est au pre- mier occupant. Ayez un habit noir et des gants et vous serez l'élu privilégié de toutes les cérémonies, de toutes les fêtes, pourvu que vous arriviez a l'heure désignée et, qu'il n'y ait pas une trop grande foule. La présence des étrangers venus de tous les points du monde aux solennelles époques de son culte si beau et si plein d'apparat change bien cet état de choses. Les voitu- res de toutes les classes de la société, depuis le modeste calesso traîné par une maigre aridelle jusqu'aux riches et antiques équipages des cardinaux et des princes, ne marchent qu'à des heures fixes et pour un but déterminé. Aussi est- il de longues heures durant le jour où la ville paraît suspen- dre tout mouvement, toute vie. Qui s'en étonnera? La ville de Romulus n'est-elle pas comme le phénix, ne renaît-elle pas de ses cendres? La nuit, s'il est permis de s'exprimer ainsi, Rome ressemble plus à elle-même, parce que les ruines n'ont particulièrement de l'harmonie et de la grandeur qu'autant qu'elles ne sont visibles qu'à demi. L'imagination supplée à ce qui leur manque et évoque avec plus de hardiesse les charmes du souvenir. Au Colysée , tantôt il me semblait que tous ces piliers en marbre blanc déchirés par le temps et réunis en un cercle immense formaient un aéropage de squelettes présidés par le mystère elle silence, ces immortels gardiens des tombeaux. Aux lueurs plus vives de l'astre des nuits, il me semblait que