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330                           LA VÉRITÉ
quartier de la Pêcherie, un des plus infects et des plus vermou-
lus de Lyon, au lieu d'avoir payé 4,200,000 fr. l'ancien théâtre
pour construire le nouveau à la même place. Il est vrai qu'un
emplacement égal à celui qu'occupe le théâtre actuel eût beau-
coup moins coûté dans ce quartier alors si hideux. Cette propo
sition fut faite et ne put soutenir un instant d'examen. Si l'auteur
de la notice avait été renseigné sur cette question, autrement que
par le Journal du Commerce, s'il avait songé à se rendre compte de
l'état des lieux à l'époque, il aurait retranché ce point de critique
de son mémoire.
    Les plus simples convenances, et même la sûreté publique
veulent impérieusement qu'un théâtre soit entouré de rues lar
ges, droites et d'une tenue irréprochable, que rien n'entrave la
circulation des voitures ou celle de la foule. Il est même impôr
tant que la principale entrée soit sur une place. Or, qu'on veuille
un instant se figurer le Grand-Théâtre au milieu du quartier de
la Pêeherie où ,1'on ne pouvait arriver qu'en passant par la rue
des Augustins, étroite, sombre et mal tenue (1), par celle de la
Boucherie, que le massif Paillasson rendait alors très-irrégulière,
encombrée souvent de troupeaux destinés à l'abattoir qui régnait
dans toute la longueur ; infectée de l'odeur des boutiques de
 tripiers et des dépôts de graisse d'animaux, et enfin dont le côte
méridional dans toute son étendue était la demeure des rebuts
de la prostitution publique : parla rue du Baissart, boyau infect
 et tortueux , réceptacle de la population la plus dégradée ; par
 les rues Luizerne, de la Cage et de la Lanterne, sombres, étroites
 et malpropres ; par celles de l'Ane et de la Palme, alors l'asile des
 maisons de tolérance de bas étage, enfin par celle des Bouquetiers
 où une voiture seule avait de la peine à passer. Les habitants
 des quartiers d'où l'on pouvait arriver en suivant les quais de la
 Saône sont précisément ceux qui fréquentent le moins le Grand
 Théâtre.


   (1; Les autres rues dan» le voisinage de Saint-Vincent sont encore plus
nombres, plus étroites : les rues Touret, Saint-Vincent, Tavernier, Pareille
 et Saint-Benoît