Revue du Lyonnais » série 2 - n°11 ( 1855 ) » pp.133

                      LA GAZZET't'E FRANÇOISE.                       133
regnards blancs en Canada, et qu'eu une petite troupe de treize,
un méchant se trouva bien du nombre, vous ne trouverez pas
estrange si entre tant d'honnestes citoyens, il se peut remarquer,
comme la lie au bas du vin etc., quelques avortons et desnatu-
rez citadins (dont on ne sçauroit louer la vie que par paradoxes)
qui sont venus en une nuict ainsi que champignons, comme la
mauvaise herbe croit en toute terre sans semer.
    Us croyent, non comme Socrate, qu'ils ne sçavent rien, mais
 au contraire qu'ils sçavent tout et les autres le reste... et néant-
moins, ils se souviennent à peine de leur propre nom... et sont
tant lourdauts et idiots qu'un Amphistides, qui ne sçavoit dire
s'il estoit né ou de père ou de mère , au demeurant malings
esprits, esprits de contradiction, inhabiles à la guerre et à la paix, et
dommageables en tout temps. » Ce mot rappelle celui qui
retentit il y a quelques années contre la bourgeoisie : incapable
de gouverner et ingouvernable. « A la ruine du pauvre peuple et
au détriment de la république (dont ils sont les membres pourris)
ils repaissent journellement leur pernicieuse avarice, ne croyant
point d'autre vie que celle du corps, d'autre paradis que le monde
ne d'autre Dieu que leur bource, faisant plus de dégast avec le
peu d'argent qu'ils prestent à usure, que ne faict de dommage
la tempeste, quand elle saccage les biens de la terre... Car, à la
vérité, usure est une cruelle tyrannie, et l'usurier un impitoya-
ble tyran, qui met à rançon la nécessité d'autruy, met à prix le
secours qui est deub au prochain, vend le temps, les jours, les
mois et les années que Dieu nous donne libéralement.
   « Ces sortes de gens ont les mains si frétillantes, poisseuses
et plaines de glus, que tout leur est de guerre. »
   Montaigne avait déjà dit dans son 1 e r livre que « ce n'est pas
la disette mais l'abondance qui produit l'avarice. » Le lecteur
appréciera tout ce qu'il y a de finesse et d'observation dans les
portraits d'Allard.
   « D'ailleurs, et ce qui n'est pas moins insupportable, c'est de
voir ces fins joueurs de passe-passe, pipeurs, pipans, maîtres
Gonins^fins à dorer, fins non affinez mais affinans (non trompés
mais trompeurs) passez par estamine fine, tellement estre hv -