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443 gressive, et retracer, l'histoire à la main, chacune de leurs phases littéraires, tel doit être le but de nos recherches, le sujet spécial de ce cours. Dès les premiers temps de l'histoire d'Allemagne, quand Tacite nous montre les Germains se préparant par des vertus austères, mais encore empreintes de barbarie, à soutenir la lutte imminente dont les menaçait l'ambition romaine, il nous les représente comme un peuple poétique, qui chantait en marchant au combat : « Les Germains, nous dit-il, ont leurs chants, leurs bardits, présages de guerre et de victoire. Ce sont des cris menaçants, des sons rauques et terribles, qu'ils entonnent les lèvres demi-closes et pressées contre leurs bou- cliers. » « Leurs chants, dit-il encore, sont leurs seules annales; c'est là que se perpétuent les noms de leurs héros et de leurs dieux. » Ces chants qui accompagnaient leur attaque, exal- taient leur courage, charmaient souvent leur mort, durent acquérir une nouvelle énergie quand la fortune couronna leur audace, et ce fut en entonnant le chant de triomphe d'Hermann, que les Germains, déjà maîtres de la Gaule, d'une partie de l'Espagne et de l'Italie, arborèrent enfin sur le Capitule l'étendard de leur liberté. Une sage liberté produit la paix, une liberté précoce n'en- fante que le désordre. Aussi quelles luttes, quels excès, quels crimes dans cette première époque du moyen-âge, où tant de sauvages conquérants se disputaient les dépouilles de l'em- pire romain ! Quels crimes plus grands encore ensanglante- raient l'histoire, si la Providence n'eût préparé à ces guer- riers, premiers nés de la civilisation moderne, un frein salutaire pour dompter leurs passions, pour calmer l'ivresse de leur victoire ! Dès le quatrième siècle le pieux Ulfilas avait traduit la Bible pour les Goths de Mésie. C'était le moment où l'invasion des Huns annonçait le grand conflit des peuples ; et le volume sacré, porté à travers les camps,