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        « Non, Elisa,... » dit-il à la fin,... « Elisa,... non, Dieu ne vous
     retire pas!... Elisa!... fille adorée!... moi sans vous ici-bas! Non!
     que je périsseavec vous, ou que vous me soyez rendue!... Et com-
     me le désespoir l'emportait aux plus violents transports, Mme Meyer,
     craignant pour Elisa et pour lui, l'entraîna hors de la chambre.
        Mme Meyer revint bientôt auprès de sa fille. Depuis longtemps
    elle seule couchait dans sa chambre, adoucissant par ses soins la lon-
    gue angoisse des nuits ; contre son attente, Elisa, épuisée probable-
     ment par les émotions de cette journée, reposa quelques heures.
    Pour Widmer il ne se coucha pas, et dès le point du jour il se prome-
     nait autour de la maison, préoccupé de pensées qui paraissaient lui
    redonner quelque courage. Quand les volets s'ouvrirent à demi à la
    chambre d'Elisa, il parut en ressentir du plaisir, et il épiait avec
    impatience le moment de revoir Mme Meyer. Dès qu'elle fut descen-
    due au rez-de-chaussée, il courut pour l'embrasser, il apprit avec at-
    tendrissement qu'Elisa, après une nuit bonne, reposait encore*, puis,
    l'entraînant dans la cour, il s'y promena longtemps avec elle, lui fai-
    sant part, avec un calme contraint, de choses auxquelles cette dame
    paraissait opposer des considérations de sagesse et de prudence. A
    cette résistance, Widmer s'animait par degrés, il pressait, il conju-
    rait, ou bien sa tristesse menaçante ramenait Mme Meyer à ne pas le
    pousser à bout par ses refus. En se retirant, elle parut céder quel-
    que chose, et Widmer s'éloigna plus tranquille.
       Une lettre, que j'ai sous les yeux, me met sur la trace du projet
    de Widmer. Il y rend compte à Mme Meyer d'une entrevue qu'il
    vient d'avoir avec Elisa. Plusieurs billets écrits sur des chiffons se
    rapportent à ces funestes jours, parce que Mme Meyer étant cons •
    tamment occupée autour d'Elisa, Widmer qui souvent ne pouvait la
    voir seule, ni lui causer devant sa fille, l'entretenait par ce moyen
    de ce qu'il desirait lui faire savoir.
      Dans cette lettre, Widmer annonce à Mme Meyer qu'il a vu Elisa,
    qu'elle accède à son projet, s'il peut être accompli loin de tout re-
    gard. « Autrefois, » écrit-il. « autrefois, dans ces jours à ja-
    mais regrettables, nous jurions d'être l'un à l'autre, mais nos ser-
    ments s'arrêtaient au court espace de cette vie,... celui que nous
    venonsde faire embrasse l'autre... Il est sacré, indestructible,. ..mais




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