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Les Grâce s, ces sœurs dont la mythologie de la décadence
a dégradé les fonctions augustes, ces trois messagers des sup-
pliants, ces filles de la piété, personnification suave du plus
doux attribut de la divinité, de la clémence, les Grâces prient
à leur tour pour Psyché; elles révèlent ce qu'est dans la réalité
cette faute primitive, cette déchéance si amèrement expiée.
Si l'usage de la faculté de connaître, si l'indiscrétion du désir
du cœur et des yeux est un crime, pourquoi Jupiter avait-il
allumé le désir au sein de Psyché ? Eternellement bon et créa-
teur, Dieu n'a pas fait le mal. Par la première faute, l'homme
se détachant de l'être infini et prenant conscience de lui-mê-
me est passé de l'immobilité dans le mouvement ascensionnel
de la vie. La première faute était nécessaire pour que l'huma-
nité fut emportée dans cette évolution sublime qui, la distin-
guant de l'infinij la ramène à lafindans le sein de Dieu comme
une nouvelle personne admise à participer à sa nature infinie.
Les dieux à leur tour racontent comment ils désirent l'hy-
men du ciel et de la terre. De même que les pasteurs rêvèrent
aux déesses, ainsi les dieux rêvèrent souvent aux filles des
hommes. Lorsque Dieu sortit de son repos éternel pour créer
le monde, il y fut conduit sans doute par un motif d'amour ;
car l'amour est l'unique motif de l'infini. Il semble si l'on passe
cette audace au poète que l'humanité doit parfaire l'infini et
compléter l'être :
Les enfants de la terre et les enfants du ciel
Se poursuivent ainsi d'un désir mutuel.
Voilà ce que chantent les dieux dans des vers dont le char-
me idyllique contraste admirablement avec l'aspect métaphysi-
que du troisième livre.
Enfin, Jupiter consent à l'hymen désiré. Les noces se
célèbrent dans l'Olympe. Les Muses font entendre le chant
nuptial. Au lieu de la lampe première, un astre immortel
inonde la couche de l'hymen, naguère voilée d'ombre.