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  de notre temps d'une importance générale ; mais l'empresse-
  ment dont j'ai été l'objet, cette émotion de tous les cœurs que
 je pouvais clairement apercevoir en entrant ici, me prouvent
  que la philosophie a cessé d'être une affaire d'école et qu'elle
  est devenue l'affaire d'une nation entière. L'histoire de la phi-
  losophie allemande est intimement liée, dès son commence-
  ment, à l'histoire du peuple allemand. Lorsque le grand acte
  de la délivrance fut accompli par la réformation, chacun se
 promettait tout naturellement de ne plus rester en repos que les
 objets les plus relevés, que jusqu'alors on avait reconnu aveu-
 glement, fussent tombés dans le domaine de la raison. Du
 temps du plus profond avilissement, la philosophie soutint le
 courage des Allemands, et sur les débris de leur grandeur dé-
 truite les hommes d'énergie plantèrent le drapeau de la science
 allemande autour duquel la jeunesse accourait de toutes parts.
 C'est dans les écoles des philosophes qu'ils puisèrent cette
 intrépidité, ce courage et ce coup d'œil qu'ils eurent plus tard
 l'occasion d'exercer dans des arènes bien différentes. Qui ne se
 rappelle Fichte et Schleiermacher ! Plus tard encore, la philo-
 sophie resta l'héritage et la gloire des Allemands. Et des mou-
 vements si glorieux et si durables finiraient par un honteux
naufrage, par l'anéantissement de tant de convictions si sublimes
et par la mort de la philosophie elle-même! Non jamais ! C'est
parce que je suis un Allemand moi-même et que j'ai subi al-
ternativement le bien et le mal, la souffrance et le bien-être
de ma patrie, que je me trouve ici : car le salut des Allemands
est dans la science.
    C'est avec ces sentiments, Messieurs, que je suis venu ici,
sans d'autres armes que la vérité, sans prétendre à d'autre
 protection qu'à celle que la vérité offre par sa propre force,
 sans demander pour moi d'autre droit que celui que je désire
voir conserver sans inquiétude à chacun de vous, le droit de la
 libre investigation et la liberté de pouvoir communiquer sans