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84 Mais où le cœur lassé chancelle à son insu, Et l'éternel filet d ans l'herbe inaperçu Tendu sous les pieds blancs des chastes'rêveries : Tout cela revenait dans ma mémoire aigrie, Et la famille aussi qui, prenant aisément Le zèle d'un ami pour les soins d'un amant, D'un entretien rêveur où j'ai trouvé du charme, D'une parole dite, à voii basse, s'alarme, Et semble, déjouant tout plaisir attendu, De notre affection faire un fruit défendu. Vous le dirais-je enfin? — ô lassitude vile ! O triste projet né dans un sein trop débile ! Un instant, je pensai rompre cette amitié Par qui mon être au vôtre est tendrement lié, Ou tout au moins, selon leur but, leur loi diverse, Le souffle qui rallie ou le vent qui disperse, Laisser nos âmes fuir et faire ailleurs leurs nids. Comme un nuage noir dont les flots sont brunis, Rapide, ce penser m'effleure, je le chasse ; Mais mon âme, huit jours, en conserva la trace. Ah ! que m'aviez-vous fait pour mériter ainsi Les injures d'un cœur plus faible qu'endurci? Rien, vous m'aviez souri : récompense secrète, Retour doux et sacré qui payait le poète, Bouquet qu'il acceptait en échange du sien, Non, mon affection ne vous reprochait rien, Et vous deviez me croire heureux ; j'aurais dû l'être. Mais ce chagrin méchant dont je n'étais pas maître, Goutte de fiel versé dans un recoin du cœur, Ce chagrin sans motif, problème intérieur, Comment avez-vous pu le prévoir, le comprendre, Et venir l'effacer d'une parole tendre ? Car, vous êtes venue avec empressement