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                          ET SON' Å’UVRE                            461

au fond de lui tout ce qu'il a appris, pour n'en recevoir et
n'en laisser passer dans ses Å“uvres que l'influence directe,
l'écho lointain, le parfum adouci, l'essence subtilisée et
élaborée par sa pensée propre et devenue véritablement,
quoique étrangère à l'origine, quelque chose cependant qui
est de lui (15). » Oui, malgré son amour de l'humanisme
et de la Renaissance, M. de Nolhac est équilibré. C'est un
esprit très intelligent, très ouvert, très cultivé, mais c'est un
esprit pondéré. Si l'on tient — et non sans raison, du reste,
— nous l'avons vu plus haut, à lui conserver le qualificatif
d'humaniste, il faut avouer alors que son humanisme est
singulièrement synthétique et ne s'en tient pas, comme celui
d'Horace, à de certains et trop restreints modèles. Les vers
de M. de Nolhac me font penser à ceux du charmant Catulle,
avec tout le sensualisme en moins, cela va de soi, mais
avec toute la curiosité intellectuelle qui fit de ce poète un
érudit remarquable et non pas seulement le chantre du
moineau de Lesbie dont les amoureux sentimentaux et les
collégiens en rupture de ban parcourent avec avidité les
pages erotiques. M. de Nolhac est donc un humaniste
auquel la synthèse sourit, il faut l'en féliciter ainsi que de
sa largeur de vues et d'idées grâce auxquelles il effleure en
vers comme en prose les sujets les plus divers, et passe de
l'antiquité, au Rinascimento, à la Pléiade ou aux temps


   (15) Cf. Revue des Deux-Mondes, I e r mai 1894. Article de M. Faguet
sur VAlexandrinisme. On sait que l'humaniste est un contemporain qui,
passionné d'art antique, vit intellectuellement, comme un ancien
dans le passé. L'alexandrin est un moderne, épris de l'antiquité, mais
ne faisant servir ses connaissances littéraires anciennes qu'à l'expres-
sion d'idées nouvelles, au rebours de l'humaniste, qui n'innovant
jamais, admire, imite ou « émule » les modèles du temps ancien où
il vit par la pensée.