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184 LE CHRIST D'iVOIRE Après les jours difficiles, c'était le succès, et plus encore que le succès, c'était déjà la gloire. Aussi, le caractère de l'artiste, sombre et soucieux aux débuts de la vie, s'était-il transformé en présence d'un avenir, qui lui semblait plein des plus heureuses promesses. Désormais, tout en se livrant ainsi aux travaux de son art, on le vit prendre part à toutes les réjouissances publiques, à toutes les fêtes, religieuses ou profanes, aux- quelles le ciel éclatant du Midi donne tant de charme et qui répondent si bien au caractère vif, joyeux et tout en dehors des populations méridionales. Soit qu'il s'agît de l'une de ces processions traditionnelles qui, dans les villes de la Provence, se rattachent souvent à quelque souvenir de leur histoire, ou seulement de courses de chevaux, à demi sauvages, dans les plaines de la Camargue, ou de combats de taureaux dans les vieilles arènes de la ville d'Arles, Paul Salviati n'y faisait jamais défaut, et quand, le soir, la faran- dole déroulait ses anneaux et ses longs replis sur les bords du Rhône, on était certain qu'il y apportait tout l'entrain de sa gaieté. * * Ce fut dans une de ces fêtes qu'il rencontra une jeune fille, dont la vue fixa, dès le premier jour, son cœur et sa pensée. C'était, en effet, une de ces filles d'Arles, vraies , filles de la Grèce, dont le type si pur s'est perpétué jusqu'à nos jours dans cette ville et dont la beauté est rehaussée encore par le costume gracieux et pittoresque, qu'elles ont gardé comme une précieuse tradition. Elle se nommait Laure Pisan, et, devenue orpheline de bonne heure, elle avait