Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
72              L'INDUSTRIE DE LA SOIE

Cependant ces malheurs, quoique successifs, n'ont pas
eu le caractère menaçant qu'on observe aujourd'hui.
   A ne parler que de notre pays, des difficultés s'éle-
vaient naguère dans notre commerce avec telle ou telle
partie du monde, nos affaires s'amoindrissaient sur tels
ou tels marchés, mais la consommation générale
s'accroissait dans l'ensemble, suivant les accroissements
de la population et de la richesse. Les grands peuples
du globe imprimaient le même élan à leurs entreprises,
et nous-mêmes nous conduisions avec une égale vigueur
notre industrie et avec plus de vigueur notre com-
merce. C'est ainsi que, par des compensations souvent
imprévues, nous maintenions à une hauteur presque
égale des échanges qui représentaient au moins huit
milliards de francs.
   Pendant vingt-cinq ans, malgré les coups qui nous
ont frappés, malgré des concurrences favorisées par on
sait quels événements, nos manufactures ont mis en
œuvre une quantité de soies qui n'a pas cessé de
s'accroître, qui est arrivée à dépasser 3,600,000 kilog.
et à laquelle se sont ajoutées, en grossissant également,
les autres matières textiles.
   La progression ascendante des affaires s'est arrêtée.
Cet arrêt presque soudain conduit à apporter un esprit
inquiet au jugement de la condition de l'industrie; les
incertitudes du lendemain font oublier la grandeur et
la prospérité de la veille. « Notre raison, a dit Pascal,
est toujours déçue par l'inconstance des apparences. »
Les apparences sont en effet de celles qui peuvent
nous décevoir, et l'on ne pense pas à leur inconstance.
Il ne semble pas cependant qu'il faille, à l'heure pré-
sente, se décourager, encore moins désespérer.