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DE « PAUCA PAUCIS » 471 pas qu'on « fasse succéder aveuglément une rime mascu- line à une rime féminine. » La rime doit être en rapport avec le sentiment exprimé. Il y a des rimes féminines très douces, il y en a de douces aussi parmi les rimes mascu- lines, celles par exemple, qui sont suivies d'une consonne qui se prononce : v. g. amour, sœur; dans le cas contraire, les rimes masculines sont énergiques. Pourquoi dès lors obliger un auteur à employer une rime forte quand c'est d'une douce qu'il a besoin ? En dehors de la stance où l'ordre des rimes doit être toujours le même (la stance était une « forme musicale » autrefois), pourquoi faire toujours succéder une rime féminine à une rime masculine ? « C'est une habitude contractée par analogie avec des pièces chan- tées (12). » D'après ce principe M. Tisseur s'est souvent affranchi de l'alternance de la rime. Plusieurs de ses admirables : Aurea Carmina, sont typiques à cet égard. Exemple : Vastes désirs de paix, de silence et d'oubli, Ainsi préparez-vous à mon être affaibli Un passage plus doux de ce monde agité A la mystérieuse éternité. Et je prie de remarquer que le rythme ou le charme de ces vers n'est ni moins remarquable ni moins doux, qu'au contraire peut-être le poète y dit mieux ce qu'il veut dire, puisqu'il n'a pas le souci d'introduire deux vers en cheville pour placer à l'endroit voulu la rime dont il a besoin. (12) Cf. Modestes observations, p, 284.