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480 LITTÉRATURE Ouvrons toute la voile, et que la poésie D'un siècle corrompu flétrisse l'infamie. Bravo ! me dira-t-on ; mais dans ce beau projet, Ton génie est-il bien au niveau du sujet? As-tu de tes aines retrouvé, pour tout dire, La flamme, la vertu que chez eux on admire, Et dont je n'ose pas même dire le nom (1)? Que te fait Mutius, s'il te condamne ou non ? Mais de Tigellinus (2) la critique est moins saine: Va tracer sous des crocs un sillon clans l'arène ; Va te faire empaler et flamber tout fumeux, Comme ceux dont il fait des torches pour ses jeux (3). — Quoi donc! l'empoisonneur de trois oncles, d'un frère, Couché sur Fédredon, rira de ma colère? — Passe! et s'il vient à toi, bouche close! aujourd'hui On est un homme mort quand on a dit: C'est lui (4) ! Fais battre, si tu veux, Turnus avec Enée ; Qui s'inquiète d'Achille et de sa destinée, D'Hylas avec son urne au fond des eaux perdu jô) ? Mais quand Lucillus, tirant son glaive nu, Frémit aux fiers accents d'une ardente éloquence, (1) La liberté. (2) Affranchi tout puissant sous Néron. (3) On croit que c'est une allusion au martyre des premiers Chrétiens. (4) Ce mot, qui flattait Demosthène, devenait une injure pour un scélérat tel que lui. (5) C'est la troisième fois que le poète revient à la même idée.