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                               POÉSIE
Et me pesa plus lourd qu'un noir pressentiment ?
L'avenir levait-il son.voile en ce moment !
Je pensai : le retour ? peut-être aussi sa perte I
La veille d'un combat, quand un soldat déserte,
Son jugement à mort est tout apostille.
Poussé par moi, grand Dieu ! s'il était fusillé !
Et ne pouvant garder l'épouvantable doute :
— « Avec toi, maintenant, je veux faire la route,
« Pénétrer dans le camp, voir tes chefs, leur parler.
Effrayé du dessein, il voulut m'ébranler,
M'en montra les périls, employa la prière,
Mais ne l'écoutant plus je marchai la première.


                                 VI

Nous allions dans la nuit, essayant d'éviter
Jusqu'au moindre des bruits que l'écho peut porter ;
A chacun de nos pas, comme un oiseau fidèle,
Quelque doux souvenir nous frôlait de son aile,
On eût dit que le ciel ne s'était étoile
Que pour nous montrer mieux le bonheur envolé.
Les arbres, les sentiers, le ruisseau, chaque pierre
Nous faisaient, malgré nous, regarder en arrière !
Mais en vain, du passé nous parlaient-ils tout bas,
Nos yeux remplis de pleurs ne débordèrent pas.
Nous marchâmes ainsi la nuit, un jour encore ;
Et la faim qui tiraille et la soif qui dévore,
Ne purent nous voler que de faibles instants.
J'avais les pieds meurtris, nous étions haletants ;
Le camp se vit au loin ; sérieuse, attentive,
Seule alors j'avançai ; j'entendis un : Qui vive !
Au soldat apparu j'affirmai hardiment
Savoir de l'ennemi le dernier campement.
Au moment du danger tout espoir qu'on apporte
Fait que le plus illustre à l'humble ouvre sa porte,
Pâtres, filles des champs pouvaient être entendus ;
Nombreux avaient été leurs services rendus.
Aussi l'effet produit dépassa mon attente :