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 162                          POÉSIE




                                 II

 Bercés par le plaisir ou heurtés par la peine,
 Les jours vont se groupant et forment la semaine.
 On se trouve surpris que malgré tout, le temps
 Accomplisse un matin le seizième printemps :
 C'est la vie en bouton, le beau moment, l'aurore !
 Je n'avais rien aimé, j'étais plus triste encore
 Lorsqu'enfm le bonheur vint me tendre la main.
 Je rencontrais parfois, faisant même chemin,
 Un jeune laboureur, au gracieux visage,
 Qui, timide, d'un mot saluait mon passage....
 Quel lien invisible existait entre nous,
 Pour qu'un fsimple salut me parût aussi doux ?
 De charmants entretiens bientôt y succédèrent
 Et de ma vie en pleurs les secrets .débordèrent.
 Lui me disait : comment, enfant abandonné,
 On l'appelait d'un nom par le hasard donné.
 Ce qu'il avait souffert de l'injustice étrange
 Qui rejette l'affront sur la tête de l'ange,
 Quand le père coupable est souvent honoré :
Pour sa naissance abjecte on l'avait torturé.
 Rien comme la douleur ne sait unir les âmes ;
 Nous sachant malheureux, dès lors nous nous aimâmes
De cet amour profond que ne comprennent pas
Ceux qu'une tendre main soutint aux premiers pas.
On s'éprend, voyez-vous, mille fois davantage,
Quand à mère ni sœur le cœur ne se partage ;
Quand le passé n'a pas une heure, un souvenir,
Un seul mot de bonté que l'on puisse bénir !
Dès ce jour pour nous deux ce fut une autre vie ;
Joyeux il m'accourait ; j'apparaissais ravie,
Et nous aurions, je crois, connu le désespoir
Si la semaine eût pu s'écouler sans nous voir.
Mais l'ange qui nous suit, constamment nous surveille.
Dans nos chers rendez-vous pouvait prêter l'oreiile ;
Car la pauvre orpheline et l'humble enfant trouvé,