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406         BN ANGLAIS QUI PENSAIT PROFONDÉMENT.

 sera en vue de Gênes et réglera pour moi le compte de vos
 coups de cravache avec votre roi de Piémont ! »
    Le comte, comme autrefois Neptune, s'en tint au quos ego, et
 ne frappa point ; non qu'il se sentît le moins du monde intimidé
de l'escadre en perspective, mais pris d'une véritable admiration
pour le sentiment qui en avait inspiré la menace au hardi pale-
frenier.                                                 .t
   Par suite d'une solidarité qne l'on ne saurait trop admirer, en
effet, le moindre sujet anglais porte avec soi, hors de son île, la
conviction profonde que l'action protectrice de son gouverne-
ment le suit en tout lieu ; que sa querelle à lui, quelque pari
qu'elle se meuve, deviendra immédiatement celle de son pays
tout entier, et sera épousée comme telle par les agents de son
pays à l'étranger. — Le gouevrnement, en retour, sait avec la
même certitude qu'il n'est pas un Anglais qui ne se tienne pour
personnellement engagé dans toute question d'honneur ou d'in-
térêt national. Cette confiance réciproque est la force et la gran-
deur de l'Angleterre. La hache des proconsuls, le faisceau de ver-
ges des tribuns tombaient autrefois devant ces seuls mots : « Je
suis citoyen romain, » prouoncés par un accusé quel qu'il fût. Le
citoyen anglais prétend aujourd'hui faire revivre pour lui le même
privilège sur tous les points du globe. Qui faut-il en blâmer, du
gouvernement assez fort pour inspirer une prétention aussi fière
à ses sujets, ou des gouvernements assez faibles pour l'admettre?
   Mais revenons à M. Jobsthon :
   — Servez du crapaud à moâ, avait-il dit.
   L'heure du souper approchait, et par conséquent celle de l'é-
preuve.
   Il est indispensable, avant de passer outre, que je prévienne
ceux de nos lecteurs qui ne l'auraient pas expérimenté par eux-
mêmes, que, dans la saison d'automne, on mange en Maurienne
des grives que je mets, pour mon compte, par la délicatesse de
leur chair et leur fumet exquis , fort au-dessus des merles de
Corse nourris de baies de myrte et si prisés des gourmets.
   Le sous-lieutenant nous avait quittés après un moment d'à parte
avec le père Mouton, et avait poussé une reconnaissance du côté