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78            LE PAGK BU BARON DES ADRETS.

    Malgré notre éloignement des bruits du dehors, il nous
arrivait, dans nos retraites, comme un écho des tempê-
tes qui grondaient de toutes parts. Les religieuses pa-
raissaient souvent effrayées, et malgré leur désir de ne
pas laisser voir leur trouble, nous devinions comme un
péril toujours plus menaçant. Souvent on nous deman-
dait des prières pour écarter les dangers qui menaçaient
le couvent comme toute la chrétienté. Souvent les clas-
ses étaient distraites et les prières sans ferveur. Vous le
dirai-je ? et m'aimerez-vous encore? Sans prévoir les
crimes qui se préparaient et l'épouvantable catastrophe
dont j'ai été le témoin et dont le récit est parvenu jus-
qu'à vous, je voyais sans effroi les périls dont on parlait
 menacer les couvents et les cloîtres, et dans la dispersion
des brebis du Seigneur, je ne prévoyais pas d'autre
événement que d'être dispensée de vœux éternels, de
 quitter des compagnes douces et craintives et de me
retrouver, même comme une intruse et uue enfant de
 trop, dans le vieux manoir paternel.
    Hélas ! à quel prix devais-je voir briser mes chaînes ?
    Un jour, un grand bruit de cloches et de mousquets
retentit dans Chabeuil; des cris s'élevaient au ciel et per-
 çaient à travers le retentissement de l'artillerie et de la
 bataille. Les Huguenots avaient emporté la ville de vive
 force et une troupe forcenée atiaquait les murs du cou-
 vent. La Supérieure, voyant tout perdu et songeant au
 sort affreux réservé aux vierges du Seigneur, assembla
ses filles affolées de terreur et leur peignit la mort
 comme plus douce que le déshonneur. Enfermant ses
filles chéries dans la partie la plus reculée du "couvent,
ferme comme une marlyre des anciens jours, sublime