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UN ANGLAIS QUI PENSAIT PROFONDÉMENT Suitt et fin. — Un Anglais, du moins, fis-je à mon tour, peut seul en avoir la prétention, et avant de disposer ainsi de l'univers en faveur de la Grande-Bretagne , il ne serait peut-être pas hors de propos, cher père, de le consulter un peu, ce pauvre univers ? Le capucin répondit à ma susceptibilité par un de ces fins sou- rires qui lui étaient habituels , et je compris aussitôt que je ne pouvais raisonnablement risquer aucune protestation sérieuse dans une circonstance qui l'était aussi peu. Nous nous confinâmes donc, îe sous-lieutenant et moi, dans notre rôle de vaincus, et cette apparente confession de notre dé- faite n'ajouta pas peu aux douceurs d'un triomphe dont le pa- triote enfant de Birmingham jouissait en toute naïveté. A propos d'orgueil national anglais, il me revient en mémoire une anecdote que je rapportera: cpisodiqueïEent ici , et dont je puis garantir la parfaite authenticité. Un officier-général piemon- tais, appartenant à la haute aristocratie de Turin et grand ama- teur de chevaux , avait un palefrenier anglais. Visitant un jour ses écuries, ii eut lieu d'être mécontent du service de ce dernier et plus mécontent encore des réponses qu'en obtinrent ies obser- vations qu'il se crut en droit de lui adresser. Poussé à bout et naturellement irritable, il leva sa cravache sur l'insolent valet, mais il n'avait pas encore eu le temps de frapper, que celui-ci le regardant fièrement, croisa les bras et lui dit sans s'émouvoir : « Osez, monsieur le comte, osez ! mais rap- pelez-vous qu'il n'y a pas trois cents pas de votre hôtel à celui de l'ambassade anglaise ! Dans cinq minutes, notre ministre aura reçu ma plainte, et avant un mois, une escadre de notre reine (1) Voir la précédente livraison.