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312              ON NE CROIT PLUS A RIEN.

promesses, quelques poires de race et de légitimes espé-
rances de café, pour le couronnement.
   Je le plaçai bien en face moi, au grand jour, ce trucheman
des bons esprits, qui me plaisait de plus en plus. Cette mise
en lumière accusa peut-être davantage le lustre équivoque
de son habit noir, mais sa bonne figure soutint victorieuse-
ment l'épreuve et n'en parut que plus honnête. Je n'ai
jamais vu manger une côtelette avec plus de naturel et de
bonhomie. On eroit que ce n'est rien ; il y a bien des choses
dans la manière de s'y prendre. Il me rappelait cet excellent
Bouffé dans le Bouffon du prince , ^mangeant avec une
 gourmandise adorable une bouchée de bon pain. Seulement
 le mien ne jouait pas la comédie ; malgré quelques airs de
 gêne et de timidité, il y allait tout de bon : sous sa grâce
 naïve, il avait de la dent.
    Chassées par un second verre de madère, les côtelettes
 passèrent comme une rosée sous un rayon du soleil.
    — Dans quel bureau êtes-vous donc? demanda-t-il, au
 premier coup de couteau que reçut le pâté.
    — Dans les Assurances, répondis-je , en continuant
 d'égorger la victime.
    — Quelle Compagnie ?
    — La N"\
    — Oh ! oh ! c'est une grande... votre avenir est assuré.
    — Est-ce que vous avez jamais été la-dedans, vous?
    — Beaucoup.
    — En vérité?... nous voila tout à fait camarades
    — Vous êtes bien bon... mais, moi, je n'ai jamais connu
 que de mauvaises Compagnies.
    — 11 ne vous est rien resté de si fâcheuses relations
    — Rien resté         vous ne croyez pas si bien dire en
 riant.
    — Bah!.... contez-moi donc cela.