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72 ON NE CROIT PLUS A RIEN. Eh ! bien, oui, mardi matin, je vous défie de le nier ; à l'hospice, vous savez bien au chevet de notre an- cien camarade, ce malheureux Morisot, qui rendait sa belle âme à Dieu, entre les bras de cette jeune sœur des pauvres... Vous l'avez vue, cette fille céleste de Saint-Vincent, cette vierge pâle aux yeux bleus, belle a ravir les saints , frêle comme une enfant et brave comme une mère, douce comme la charité et forte comme la foi vous l'avez vue, penchée sur cette agonie, avec ses soins touchants, le sou- rire et la prière aux lèvres, aidant ce vieillard à mourir en paix Il passa comme sonnait la dixième heure. Alors, ayant fermé les yeux au pauvre mort, l'ange s'age- nouilla pour finir sa prière.... et nous fîmes comme elle. Pour moi, naïf, on me prendra toujours avec ces moyens- la. Voilà un genre de raisonnement, une métaphysique sim- ple, devant laquelle je ne tiens pas. Mais vous, homme fort, qui avez prié avec cette ange, ne vous en défendez pas, qu'en faisiez-vous en ce moment de ces gros yeux que vous m'ou- vrez? deux fontaines! fontaines honteuses, car vous les cachiez, Monsieur oseriez-vous jurer qu'a cette heure vous n'y avez pas cru, en Dieu, saltimbanque ! — Que qu'esl-ce que cela prouve...... un un effet physique...... balbutia-t-il sourdement. — Vous n'êtes donc qu'un veau sensible? . . . moins que cela, un parchemin qui se détend quand on le mouille!... Je m'emportais. Les injures ne prouvant pas l'existence de Dieu, je sentis qu'il fallait revenir à ma diversion. — Enfin. . . avez-vous connu Ravinel? lui criai-je avec un reste de colère. Cette question paraît simple;mais il était émoustillé, elle suffit pour le faire éclater. — Non! rugit-il, non!!.. je ne l'ai pas connu.......