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                LÉGENDES DE LA VILLE D'ARS.                163
qui lu y étoit venue de se donner toutafait à Dieu, et il
ne l'en dissuada pas. Le désert de la Silve-benîte avoitplû
ou à sa dévotion, ou à sa mélancholie : il y appella des Reli-
gieux de l'Ordre des Chartreux, et leur y fit bâtir vn Couvent.
L'Empereur fournit abondamment tout ce qui étoit néces-
saire pour la construction de la Maison, et pour l'entrete-
nement des Religieux Le Domaine Royal y fut employé, et
augmenta celuy de IESVS-CITRIST. Le Pape Alexandre
approuva cette fondation et adjoûta à la libéralité de l'Em-
pereur. La villed'Ars, assise sur le bord du Lac de Paladru,
n'avoit pas été favorable à la naissance de ce Monastère,
et avoit témoigné peu de respect à ses Religieux. Son mépris
parut vn Sacrilège aux yeux des gens de bien. Comme les
volontés n'étoient pas toutes vnies dans un même interest,
on imputa à ses Habitans le crime d'être ennemis du S.
Siège, l'étant de cet Ordre qui avoit tant de zèle pour luy.
Ils furent attaquez,et forcez dans leur Ville : elle fut sacagée
et ruinée : l'Eglise même n'en resta pas debout. Tout y
périt, et ces mal-heureux ayant été exterminez, leurs fonds
n'eurent plus de possesseurs. Le zèle inconsidéré est sou-
vent cruel à lny-même, et l'est presque toujours à autruy.
Terric demanda à Alexandre pour cette maison, qui étoit
l'œuvre de ses soins, le Territoire de cette Ville renversée,
et l'obtint facilement. On croyoit dans ces desordres , qui
confondoient les droits des puissances, que le Pape pouvoit
tout ce qu'il vouloit ; que son authorité etoit sans bornes .
et que recevoir de ses mains etoit vn titre qui ne pouvoit
 souffrir de contestation, qu'entre les hérétiques. Ce senti-
 ment vniversel parmy les Ordres religieux fut le fondement
 du droit du Pape, ou, pour mieux dire, fut tout ce qu'il eut
 de droit à disposer de ce Territoire; q u i , comme vn bien
 vacant etoit devenu Domanial. Néanmoins , il falut que
  quelques années après Robert Archevêque de Vienne, et
  •Uumbert III Comte de Savoye, favorisassent de leur autho-
 rité cette donation. Ils donnèrent chacun de son chef à la
  Chartreuse de la Silve-benîte le lieu d'Ars , comme s'il ne