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ET SUR LE RETOUR. 331 nouvelles reçues de leurs anciennes élèves elles ne parlent que des choses aimables qu'elles leur ont écrites, des riches ca- deaux, témoignages de tendresse et de reconnaissance qu'elles en ont reçus, sans jamais ajouter qu'elles ont aussi en caisse la remise sur Genève représentant les rentes avec lesquelles elles s'entretiennent dans un doux nonchaloir ; cette mention toute pécuniaire matérialiserait sans doute l'expression de leur gratitude et pourrait ôter quelque chose à la délicate pu- reté de leurs sentiments pour les hautes dames dont elles exaltent l'attachement et taisent les lettres de change. L'institutrice qui revient avec une figure et une bourse également jolies, avec le moins d'années et le plus d'espèces possibles, aspire souvent à trouver un époux ; elle renonce dans ce cas à se procurer un carlin, un angora ou des serins; elle remplace ces charmantes petites bêles par un mari ; mais, hélas! le mari ne saurait être ni prince ni jeune, en sorte que s'il a de déplorables habitudes et des manières bour- geoises, l'institutrice a bien du mal à les combattre et bien de la peine à les corriger; elle ne retrouve plus alors pour faire cette tardive éducation l'âge tendre et la douceur de ses premières élèves; le sujet est rude à manier, elle ne saurait lui inspirer cette crainte et celte déférence qui seules rendent praticable le redressement de l'enfance; elle s'est placée en face d'un âge où la souplesse est nulle, la résistance réelle et l'humeur dominatrice. Décidément elle a mangé son pain blanc le premier en fait d'éducation à faire du moins; et quel- quefois, le plus fréquemment même, elle subit le joug au lieu de l'imposer. Comme dédommagement à ses contrariétés de ménage, il lui vient sans cesse de l'étranger de superbes présents de noces pour elle et de magnifiques parrains pour ses enfants, elle forme ceux-ci avec plus de facilité que leur père, et s'acharne d'autant plus à combattre les penchants roturiers de ses fils