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                        M. ALEXANDRE DUMAS.                             141
pour rabaisser de beaucoup le mérite dramatique et littéraire
jusqu'alors incontesté de l'auteur à'Antony. En effet, sans se
montrer aussi sévère ni aussi rigoureux que l'écrivain, un peu
trop afflrmatif dans ses remontrances, on ne peut s'empêcher de
reconnaître que M. Dumas n'avait pas fouillé bien avant dans les
ressources de son imagination pour créer ses personnages et in-
venter ses situations les plus émouvanles ; car, bien avant lui,
Walter Scott, Schiller, Goethe et Lope de Vega avaient fait à peu
près tous les frais de ceux-ci et de celles-là. On citait de l'auteur
de Waverley telle page où se lisait mot pour mot la fameuse scène
de brutalité du duc de Guise (1); telle œuvre renfermant le pro-
logue tout entier de Richard d'Arlington. De nombreux em-
prunts faits à la Conjuration de Fiesque, à Don Carlos, au Comte
d'Egmont, à Goetz de Berlichingen, à la Mort de Wallstein, à
Amour et Honneur; les meilleures pièces du théâtre allemand et
espagnol complétaient ce que M. Dumas n'avait point tiré de l'Abbé
ou des Chroniques de la Canongate. Quant à Gaule et France,
Chateaubriand et Augustin Thierry avaient fourni non seulement
l'idée et le plan de l'ouvrage, mais encore un assez bon nom-
bre de phrases et de passages copiés par M. Dumas, et intercalés
sans plus de façon dans son récit (2).
    Ces trois articles eurent beaucoup de retentissement dans le
monde littéraire, où, par ses allures expansives, la facilité de ses
relations, son habitude de donner des fêtes et de partager ses plai-

   (i) M. Barthélémy faisait, hier encore, allusion à cette scène, en parlant
des continuateurs de Sophocle et d'Euripide :
                                 Avec leurs yeux de flamme
          Ces grands hommes ont vu les mystères du drame :
          Pour émouvoir le peuple ils plaçaient leurs ressorts
          Dans la nature humaine et non dans les décors.
          L'art ne dépendait pas du travail des coulisses ;
          C'est l'âme et non le corps qui montrait ses supplices ;
          C'était la passion qui souffrait, qui saignait ;
          Ils meurtrissaient le cœur et non pas le poignet.
                                                           {Zodiaque.)
   (a) Journal des Débats des i cl ', 26 novembre r833, et 3o juillet 1834.