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100                   CHRISTOPHE COLOMB.
s'élever à la puissance, à la largeur qui n'appartiennent qu'au
génie. Pour n'appliquer ces remarques qu'au Christophe Colomb,
on a trouvé que les motifs bien francs, bien spontanés, y sont
rares. Ce n'est que dans la quatrième partie qu'apparaissent quel-
ques-unes de ces idées vivement accusées qui enlèvent un au-
ditoire. Ges idées appartiennent toutes, du reste, au même ordre
de sentiment, une inspiration douce et tendrement élégiaque ;
c'est quelquefois aussi une fantaisie brillante et spirituelle, ja-
mais une émotion mâle et profonde, une excitation héroïque,
un accent grandiose. Pourquoi se fait-il qu'un sujet immense
comme Christophe Colomb et la découverte d'un Nouveau-Monde
nous laisse surtout l'impression d'une suite d'élégies rêveuses
et de danses pittoresques. Ce sont au moins les passages re-
marqués de ce caractère qui seuls ont saisi vivement le public
et môme des oreilles plus austères.
    Malgré les morceaux descriptifs qui cherchent à rendre l'effet
du calme, de l'orage, de la nuit sous les Tropiques, nous ne
pouvons pas reconnaître à cette musique un sentiment ori-
ginal et profond de la nature. Nous ne confondons certes pas
ce qu'on appelait autrefois dans les arts l'harmonie imitative,
avec le don de rendre avec vérité l'impression qui naît dans
 l'âme de telle ou telle scène de l'univers. Ce n'est pas avec une
 imitation bien technique du bruit des vagues ou du chant des
oiseaux qu'on nous transportera au bord de la mer ou dans
 une forêt, et nous ne demandons pas au musicien ces puériles
bannalités. M. Félicien David a eu le bon goût de les éviter. A-
 t—il trouvé d'autres moyens pour jeter en nous le sentiment de
 la mer et des forêts du Nouveau-Monde ? Ce n'est pas ce qui
nous a semblé. Il est vrai de dire que c'est bien de la préten-
tion de la part de la musique de vouloir faire ainsi des épopées
presque à elle seule. Car nous ne considérons pas comme une
innovation bien utile et même bien agréable l'intervention du
récit au milieu de l'orchestre, et le nom d'ode ajouté à celui de
symphonie. Comment la présence des vers , toujours très-mau-
 vais, qui serviront de prétexte à ce genre de composition , pour-
 ra-t-il amener des effets inconnus à Beethoven et aux autres