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122                MADEMOISELLE DE MAGLAND.
je la prendrais au prix d'estimation. Je pensais pouvoir vous lais-
ser le mobilier, assez peu de mon goût, du reste, comme vous sa-
 vez, mais les hommes d'affaires s'y opposent, et vous sentez que je
ne dois agir que d'après leurs conseils ; je n'ai pas besoin de vous
dire que je n'ai aucune prétention sur tout ce qui vous appartient
personnellement ; nous en excepterons cependant les voitures et les
chevaux qui doivent faire partie du mobilier. Je ne vous presse
point de quitter le Genêt, attendu que les formalités à remplir pour
m'en assurer la possession pourront bien prendre encore un mois
ou deux. Il est possible, d'ailleurs, que dans ce moment vous ayez
assez besoin de distraction pour que ce déplacement qui pourrait
vous donner l'idée de quitter la Suisse, ne vous soit pas tout-à-fait
désagréable.
   J'espère, ma chère cousine, que ces arrangements vous satis-
feront entièrement, et vous prouveront mon désir de vous être
agréable. »
                                                  ALIX B.


    Cette lettre où pas un mot de consolation ni de sympathie n'es-
 sayait de déguiser l'avarice et l'égoïsme qui s'y montraient à chaque
 ligne, vint encore attrister Marie : sa pensée ne s'était jamais arrê-
tée que vaguement sur la catastrophe qui la ruinait et l'idée qu'elle
 pourrait être un jour obligée d'abandonner le Genêt ne lui était ja-
mais venue. On a beau se préparer au malheur, tant qu'il n'a pas
frappé, on le croit impossible. Les âmes les mieux trempées man-
quent souvent de cette espèce particulière de courage nécessaire
pour aborder de front les répugnants détails qui suivent un éclatant
revers de fortune ; l'idée seule d'une discussion d'intérêt avec Alix
inspirait à Marie tant de dégoût et de répulsion qu'elle accueillit
presque avec plaisir la proposition que, dans sa colère, M. de Mal-
vignane lui fit d'abandonner le Genêt sur-le-champ. Vainement
M. de Blossac les engagea à attendre encore. — Laissez-moi écrire
à Raoul, disait-il, il ignore sans doute ce qui se passe ; au point où en
sont les choses, il a le droit de se mêler de tout ceci ; il ne laissera
certainement pas MUe Alix s'emparer de cette propriété qu'il doit
regarder comme sienne, que nous avons embellie avec tant do