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L EXPANSION. 271 Épanche donc, poète, épanche donc au monde Tes douleurs du passé, les songes d'avenir, Tout ce qui t'embrase ou t'inonde Et qu'en vain tu veux contenir. Souviens-toi de ces nuits sereines, De ces heureuses nuits d'été, Où notre esprit brisait les rênes Dont l'étreint la réalité ; De ces nuits où, du flanc des nues, Descendaient ces voix inconnues Que nous écoulions à genoux : Nuits si splendides et si belles Que nos tristesses immortelles Oubliaient de pleurer en nous. L'été nous les ramène encore Ces fraîches nuits d'illusions, Qui, du crépuscule à l'aurore, Écoutent nos expansions, Où ton œil descend et pénètre Dans les profondeurs de notre être ; Où, semblable au jeune Daniel, Le front inspiré, tu m'expliques, Tous ces signes cabalistiques Que les étoiles font au ciel. Épanche sur nos fronts tout ce que tes doigts d'ange D'accords tombés des cieux recueillent ici-bas, Et nous te rendrons en échange Notre force que tu n'as pas.