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MADEMOISELLE DE MAGLAND. 249 entrée dans les églises que pour voir des statues et des tableaux ! Elle détruira vos croyances comme elle a détruit votre respect aux volontés de votre mère. Chacun de nous a son sillon à tracer dans le vaste champ des misères humaines, mais je ne croyais pas avoir mérité que le mien fût si rude ; sans doute, la Providence a voulu me châtier dans la vanité que j'avais mise en vous ; que sa sainte volonté soit faite ; elle me tiendra compte un jour du bon grain que j'ai semé parmi l'ivraie. — Raoul, qui savait par expérience combien il était inutile d'essayer de combattre les idées de sa mère, gardait le silence. —Vous savez, reprit-elle, quelle fut ma douleur et quel fut mon sacrifice quand il me fallut céder à vos désirs in- sensés ; vous comprendrez que j'aurai le courage de m'en imposer aujourd'hui un second. Ma conscience me défendant de sanctionner par ma présence votre union avec Mlle de Magland, je vais retour- ner en Bretagne. Cette résolution n'est pas récente, elle n'a été dictée ni par la colère ni par le caprice; longtemps combattue, elle est depuis longtemps arrêtée, et les retards que j'ai mis à vous en faire part témoignent assez de la lutte que j'ai dû sou- tenir avant de me décider à manifester si hautement la douleur que me cause votre mariage. Puis, commençant contre Marie une amère récapitulation de tous ses anciens griefs qui s'étaient aug- mentés de tout ce que la pauvre enfant avait fait ou dit la veille, elle finit en déclarant à son fils qu'il eût à s'abstenir de prières et de supplications, sa résolution de partir aussitôt les beaux jours ve- nus, étant inébranlable. — Je vais encore, ajouta-t-elle, vous faire part d'un événement qui vous donnera peut-être matière à réflexion. 11 m'est revenu, d'une manière certaine, qu'à l'exemple des nobles de ce temps, M. de Magland a voulu essayer de gagner de l'argent, et qu'il a gravement compromis sa fortune dans des spéculations hasardeuses ; il dépense en ce moment tout ce qui lui reste aux indécentes futilités de l'appartement qu'il destine à votre femme, lequel, soit dit en passant, serait peut-être convenable pour une demoiselle de l'Opéra, mais où jamais une fille honnête de mon temps ne se fût décidée à mettre les pieds. Vous pouvez donc être assuré d'avance que vous épouserez une fille sans dot. — Ma mère, répondit Raoul, si j'ai pu trouver dans mon amour pour Marie la