page suivante »
DU BUGEY. 95
a toujours été dénommé le champ des Tattes. Deux autres
localités dans cette région portent ce même nom.
Ainsi, dans ces gorges du haut Bugey, voici trois villes de-
puis longtemps anéanties, Orindinse, Isarnore et la cité des
Tattes. La première est connue seulement par un document
historique qui nous apprend son existence et sa destruction; la
seconde, dont on ignore le sort final, est démontrée par des
monuments que le temps n'a pas tout à fait détruits. Couverte
d'un voile que soulève à peine la tradition, la troisième est
livrée aux plus vagues conjectures. Que les Sarrasins aient
détruit ces trois villes, c'est la plus admissible des supposi-
tions ; mais, en l'énonçant, on ne doit pas omettre que, deux
siècles après , les Hongres , autres dévastateurs , passè-
rent sur celte zone du Haut Bugey. Ce fait sera établi à sa date.
Si nous visitons la vallée de l'Albarine semblable auxTher-
mopyles, et dont les rochers portent aussi une inscription
glorieuse d'une date contemporaine (1), nousy trouvons la pré-
sence des Sarrasins attestée par un témoignage irréfragable.
Leidrade, archevêque de Lyon, après avoir été secrétaire de
Charlemagne, écrit à ce monarque, que, suivant ses ordres,
il a restauré dans son diocèse les édifices religieux ruinés par
les Sarrasins, et il mentionne le monastère de Saint-Ram-
bert (2). D'autres indices marquent encore leur présence dans
cette vallée. Près de Tenay et de Saint-Rambert, sont trois
constructions anciennes, isolées dans des gorges écartées qui
(i) Dans l'invasion de I 8 I 5 , trois cents gardes nationaux de Saint-Rambert
se postèrent aux Balmettes, dans le défilé de l'Albarine, et ils y tinrent en
échec, plus de quinze jours, un corps d'armée ennemi. Ils ne se retirèrent
qu'après la prise de Lyon, lorsque leur héroïque résistance fut devenu inutile.
Dans le cours de cette histoire, nous retracerons ce patriotique fait d'armes,
resté presque inaperçu à côté des immenses événements de cet époque.
(i) La lettre de Leidrade est rapportée par M. Deperry, Hist. Hagio-
logique, tom. I, pag. 99.