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                DE LA RAISON IMPERSONNELLE.                   469

vérité que notre bouche nie, dans une discussion où l'amour
propre s'égare, n'est pas ébranlée pour cela dans notre cons-
cience. D'ailleurs il est quelque chose de plus invariable, de
plus universel que les jugements portés sur le bien, c'est l'idée
de bien elle-même. Pour différer sur la cause d'un fait en
est-on moins d'accord que ce fait a une cause ? Les jugements
contradictoires des hommes ne sont pas à déplorer, car ils té-
moignent de leur perfectibilité morale et procèdent d'un sen-
timent du bien plus éclairé et plus pur. —. La morale n'est
pas double, ici religieuse et fondée sur l'idée de Dieu, là phi-
losophique et fondée sur l'idée de bien. « Dieu, dit M. Bouil-
lier, est le sujet môme, la substance du bien. Gomment donc
séparer Dieu, le bien et la justice?... Quiconque fait abstraction
de l'idée de Dieu fait en même temps abstraction de la cau-
salité, de l'éternité, de l'immensité, de l'immutabilité, en Un
mot des idées de tous les attributs et de toutes les propriétés
dont Dieu est la substance. Otez Dieu, ôtez l'idée de Dieu et
il n'y aurait pas plus de bien et de justice pour nos âmes,
qu'il n'y aurait de lumière pour nos yeux, si le soleil, foyer
de la lumière, venait à Ctre anéanti.... Il faut donc enlière-
rement effacer la distinclion d'une morale philosophique et
d'une morale religieuse, d'une morale humaine et d'une
morale divine. Quiconque suit cette loi éternelle, qui est la
loi de Dieu même ou plutôt qui est Dieu lui-même, sert et
honore Dieu précisément de la manière dont Dieu nous noi-
tifie par la raison qu'il veut être servi et honoré. »
   Cette réduclien des idées de la raison à l'idée d'infini, était
indispensable, on le verra, avant d'étudier la raison, non plus
en nous, mais en elle-même et dans sa nature, avant de justi-
fier celte qualification d'impersonnelle qui lui a été attachée
dès le principe. La raison est-elle vraiment nôtre ? Est-elle
une faculté semblable à toutes les autres et qui ne s'en dis-
tingue que par son objet, une faculté destinée à percevoir