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A TERNAY, 107 se penche sur ses flots impétueux; une pensée, rapide comme l'éclair qui annonce la foudre, traverse son esprit, et tandis qu'elle porte à sa tête et y fait bouillonner tout son sang, elle revêt une forme au sein de l'abîme où son œil est fixé ; c'est une figure indéfinissable; c'est un démon qui l'appelle et qui l'attire avec un charme infernal Soudain il recule épouvanté de l'appa- rition et de lui-même; la religion a crié au fond de son âme, elle le rend à l'existence et au malheur. Alors il ressent toute la violence de l'air ; l'agitation morale ne soutient plus la nature épuisée. II entre dans la maison de la vieille Magdeleine, où il avait l'habitude de diriger, pendant les beaux jours, les pas de sa mère, et s'approche de son foyer. Mais à peine a-t-il éprouvé l'influence de la chaleur que la douleur se ré- veille, le serpent réchauffé recommence à déchirer son sein. •— Magdeleine, raconte-moi les malheurs causés par l'hiver. : l'enfant qu'on a trouvé mort au milieu de la forêt où il ramassait quelques branches tombées pour chauffer sa famille, le vieillard que le froid des nuits, plus que le froid des ans, a glacé dans sa couche. Répète-moi ces récits lamentables; tout ce qui pleure, tout ce qui souffre, toui ce qui meurt est uni avec moi par les liens de fer d'une invincible simpathie.— Eh quoi! s'écria Magdeleine, vo- tre mère est donc morte ? — Elle se meurt ; tout espoir de la conserver m'est ravi, et ce soir je serai orphelin. Mes frères des corporations entourent inutilement les autels de Saint-Maurice et de Saint-Pierre; depuis deux jours l'archevêque lui-même a fait couler le sang sacré pour la rédemption temporelle de ma mère. Le ciel est resté sourd ; aucun bienheureux n'a voulu y faire ac- cepter nos prières. —Aucun bienheureux , reprit vivement Mag- deleine; avez-vous invoqué saint Maïeul de Ternay, avez-vous eu recours à sa fontaine miraculeuse?—Non.— Cette onde salu- taire, puisée par la main de la foi, n'a jamais mouillé en vain les lèvres des mourants : elle a sauvé mon fils Eoldc, ma nièce Bertérique. Ne perdez pas un instant, Bérilon; courez à la source de Saint Maïeul, ajouta-t-elle en lui donnant un flacon, vous me retrouverez auprès du lit de votre mère. Bérilon s'élance hors de la maison de Magdeleine, retourne à Vienne, pénètre dans le