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472                          THÉORIE
    « Dieu est distinct du monde, il n'en est pas séparé, » telle
 est la formule que donne M. Bouillier des rapports de Dieu et
 du monde et qu'il justifie en démontrant que le témoignage
 de notre conscience sur notre individualité et celui de notre
 raison sur l'existence de l'être infini ne sont pas inconciliables.
 Là, on ne peut le méconnaître, est le vrai, car ainsi se dénoue
 facilement le nœud qui paraissait insoluble. Quant au mode
 de notre participation avec Dieu, l'obscurité n'en peut être
 éclairée que dans la mesure de notre progrès vers l'infini. En
 attendant, l'auteur s'aide, pour concevoir et préciser ce rapport
 mystérieux, d'une belle et poétique figure : « on peut le com-
parer, dit-il, à celui qui unit la plante avec le sol dans lequel
 s'enfoncent ses racines. Elle est attachée à ce sol, elle n'en est
pas séparée, elle y puise par ses racines, sa substance, sa sève,
sa vie ; si elle en est arrachée, elle ne tarde pas à périr, et
 néanmoins elle ne se confond pas avec ce sol qui la nourrit,
elle en est distincte, elle a sa réalité, son existence propre. De
même que la plante a sa racine dans le sol, de même tous les
êtres finis ont, pour ainsi dire, leur racine dans l'infini, de
même constamment ils y puisent tout ce qu'ils ont en eux de
substantialitô et de causalité, sans se confondre avec lui. »
    Aux bonnes raisons M. Bouillier fait, suivant la règle de tou-
te libre discussion, succéder les grandes autorités et il les choi-
sit de nature à faire impression sur ceux dont il n'en est plus
à prévoir les attaques. C'est, parmi les modernes, Fénelon, Ma-
lebranche, Bossuet; saint Jean, saint Paul, saint Clément d'A-
lexandrie, saint Augustin apportent un témoignage qui ne
commande pas moins le respect et l'on ne peut arriver à l'au-
teur qu'en forçant cette double ligne derrière laquelle il s'a-
brite sans s'effacer. Ce n'est pas le piquant qu'il a cherché en
citant le catéchisme à des prélats, en rappelant à des évêques
le serment de leur sacre, mais il ne pouvait ôter à la philoso-
phie moderne l'appui de l'antique philosophie du christianisme