page suivante »
90 SÉJOUR DE J . - . I . ROUSSEAU Lyon, dans quelques chdteaux du Dauphiné; il s'embarquait rarement seul, et il fallait, de la part de ses compagnons de voyage, beaucoup d'habileté pour ne pas lui faire apercevoir ou sentir que les frais de la route n'étaient jamais à sa charge. Les tracasseries de toute nature qu'il subit à celte époque, l'avaient momentanément détourné de la botanique ; il ne laissait pas toutefois de s'y livrer par intervalle. 11 éprouva, comme il le raconte lui-même, un très vif plaisir à cueillir, dans ses promenades, quelques plantes sinon jolies, du moins nouvelles pour lui, telles que Vosyris et le térèbinthe, le cen- chrus-racemosas, gramen maritime qu'il fut très surpris de rencontrer en ces parages, Vhypopitis, plante parasite qui lient de Yorobanche, le crespis fétide qui sent l'amande amère à pleine gorge. M. Lalliaud, qui connaissait la position précaire de J.-Jac- ques, voulut le faire revenir chez le prince de Gonti qui le comblait de prévenances ; voici la réponse qu'il reçut, c'était au mois d'octobre: « Quoique ma position devienne plus cruelle de jour en jour, que je me vois réduit à passer dans un cabaret l'hiver dont je sens déjà les atteintes, et qu'il ne me reste pas une pierre pour y poser ma tête, il n'y a point d'extrémité que je n'endure plutôt que de retourner à Trye Egalement tourmenté, quelque parti que je prenne, je n'ai la liberté ni de rester où je suis, ni d'aller où je veux , je ne puis pas môme obtenir de savoir où l'on veut que je sois, ni ce qu'on veut faire de moi. 11 m'est venu cent fois dans l'esprit de proposer mon transport en Amérique ; j'aurais fait cette tentative, si nous étions plus en état, ma femme et moi, d'en supporter le voyage et l'air., Je voudrais trouver quelque moyen d'aller finir ma vie dans les îles de l'Archipel, dans celles de Chypre, ou dans quelqu'autre coin de la Grèce; mal- heureusement pour y aller, pour y vivre avec ma femme, j'ai besoin d'aide et de protection. Je ne serais pas sans espoir