page suivante »
10 SÉJOUR DE J . - J . ROUSSEAU biographie dans laquelle, dévoilant avec audace toutes ses pensées, tous ses actes, il ose révéler à la postérité les nom- breuses vicissitudes de son existence. Mais ses Confessions ne vont que jusqu'au mois d'octobre 1765; il a vécu treize ans encore au milieu des agitations suscitées à chaque instant par ses envieux, par les contradicteurs de ses doctrines, et plus ordinairement par les mauvaises dispositions de son esprit inquiet et méfiant qui lui montrait, partout, constamment, des hommes jaloux de son génie ou attachés à sa perte. Ainsi, au mois de juin 1768, il quitta le château de Tryc en Normandie, où le généreux prince de Conti lui avait offert un, asile, à son retour d'Angleterre. « Je ne puis habiter plus longtemps, écrivait-il à son protecteur, un lieu où la gloire et l'opprobre se partagent mon séjour. » Pour se consoler de tous ses chagrins et faire diversion aux tristes souvenirs qui le poursuivaient, qui, à force d'affecter son cœur, altéraient sa raison, il se décida à chercher de nouveau dans les voyages, dans la botanique, les amusements, les distractions dont il avait besoin. Ayant avec lui, pour tout bagage, une faible partie de son herbier et quelques livres, voyageant seul, il arriva à Lyon, le 18 juillet 1768. Il dut s'y arrêter pour se remettre des fatigues de la roule, vint loger, suivant sa coutume, à l'hôtel de Notre-l>ame-de-Pitié, situé rue Syrène. Une inscription consacre la mémoire de son passage: ce fut la maison où il descendit toujours de préfé- rence; en 1732, il y était venu pour la première fois. Rousseau profila de son séjour à Lyon pour herboriser dans les campagnes environnantes. Dans une visite à Roche-Cardon, à la propriété de Mm° Bois de la Tour, il trouva l'Aristoloche , (Arislolochia clematilis) qu'il n'avait jamais vue ; cette décou- verte le combla de joie : au premier coup-d'œil, dit-il à son ami Dupérou, je la reconnus avec transport. Quoiqu'il parut en général détester el fuir la société, Rous-