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3H                        EN OISANS

              Remplissez vos urnes profondes,
              Au courant de ces fraîches ondes,
                    Filles du rocher !

  Nous lui versons un verre de Clicquot, et il nous raconte
son excursion : En deux jours, et sans guide, il a franchi le
col de l'Eychauda et celui du Lautaret (!)
  — « Eh bien ! vous n'y allez pas de main morte lui
disons-nous, mais vous devez être fatigué ?
  — « Fatigué! m o i ! . . . mais regardez-moi donc. »
  Au matin nous quittons Gaspard, non sans tristesse de
part et d'autre : nous étions bons amis. Sous une pluie
persistante, la diligence nous emporte durant les 72 kilo-
mètres qui tout au long des méandres admirables de la
Romanche nous séparent de Grenoble.
   Le Parisien, lui, attend le beau temps, pour escalader le
plateau d'Emparis (!) et peut-être en rentrant au foyer
conjugal, car il est marié et c'est ce qui le navre (il nous l'a
dit), il fera frémir une famille entière au récit de ses
marches étonnantes et des dangers fabuleux qu'il a couru
dans la Grrrande Montagne.


   Sur l'impériale-, la bâche est rabattue ; nous ne voyons
plus que les chevaux dont les harnais ruissellent, dont les
croupes fument sous des torrents d'eau. Dans le cahotement
du véhicule, au bruit des ferrailles et des grelots, au gronde-
ment de la Romanche qui mène le sabbat sur ses rives
submergées, je me laisse aller au sommeil, et vaguement,
en leur disant au revoir, je pense encore aux montagnes....
   Aux montagnes, qui cachent les joies intenses, les
ivresses de l'air, quand nous allons foulant leur gazon
desséché, leurs rochers rugueux, leurs pentes croulantes,