Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                           BIBLIOGRAPHIE
                                                                     355
M. Bonnel en contient un examen approfondi et donne sur ces points
des aperçus d'une clarté complète et d'une grande profondeur.
   A quoi bon toutes ces subtilités, demanderont certains esprits, qui
se piquent d'être pratiques et qui ne voient dans les sciences que des
règles ou des lois à utiliser en vue de leurs applications ?
   Pour répondre à ces critiques, il faut avant tout faire remarquer que
 la valeur de l'intelligence, même au point de vue de la pratique, ne se
 mesure pas uniquement par le nombre des connaissances entassées dans
la mémoire. La qualité des esprits peut être très diverse, alors même
 qu'ils sont également meublés.
   Si l'éducation a développé principalement les facultés réceptives (et
 ce genre d'éducation est facile et commun), l'intelligence accueille
 facilement sans contrôle les idées qui s'offrent à elle, et dès lors
l'erreur y trouve son chemin plus commodément que la vérité. La
plupart des connaissances acquises par la mémoire restent sans emploi
 et disparaissent sans profit avec le temps. Bien différents sont les
résultats, lorsque les études ont été dirigées en vue de former l'esprit
lui-même plutôt que de le meubler. L'intelligence habituée à l'examen
n'est point réfractaire aux nouveautés, mais elle les soumet à son
jugement; exercée aux difficultés, elle ne recule pas devant le travail
et l'effort. En possession des idées générales, elle voit plus haut et
 plus loin.
    Or, l'étude des mathématiques doit se faire d'une manière différente
 selon qu'on s'y propose comme but l'utilité pratique ou qu'on y voit
 avant tout un moyen de former l'esprit.
    Les éléments de ces sciences tiennent dans nos programmes d'en-
 seignement une place que quelques-uns trouvent exagérée. Ils ont
 raison, s'ils considèrent de quelle faible utilité pratique sont pour la
 plupart des professions, les vérités qu'elles enseignent et qui peuvent
 d'ailleurs s'apprendre en très peu de temps, lorsqu'on se borne à ce qui
 est d'usage commun. La géométrie peut perdre alors en grande partie
 son caractère de science abstraite et s'apprendre beaucoup avec la
  mémoire seule. Il en sera tout autrement si l'on considère l'étude des
  mathématiques comme une gymnastique pour l'intelligence et si elles
 sont enseignées dans cette intention. Les efforts que fait l'élève pour
 concevoir les idées abstraites et suivre de longs raisonnements l'obligent
 à se replier sur lui-même et l'habituent à concentrer son attention sur
 des sujets difficiles.