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« PAUCA PAUCIS » 279 d'obscurité, comme parfois chez Soulary, le Cellini de la poésie française. Mais la platitude, la banalité prudhom- mesque — la pire de toutes les tares — jamais ; pas une trace, pas une ombre. On cite, dans mon pays normand, une plaine où l'on chemine pendant tout un jour sans ren- contrer une pierre ; deux paysans qui s'y prennent de que- relle ne peuvent s'assommer qu'avec leurs poings. De même ici. Comme il sied à un critique qui se pique lui- même de poésie, j'ai cherché dans ce livre, pour le jeter à la tête de l'auteur, un vers de l'école du bon sens, et je ne l'ai pas trouvé. Penser n'est rien, disais-je tout à l'heure, convaincu qu'on ne voudra pas donner à ce mot une extension ridi- cule et absurde. Demandez au poète si toutes ces idées, grandes, douces, tendres, qui se pressent sous sa plume n'y sont pas venues d'elles-mêmes, sans qu'il les pour- chasse, sans qu'il les appelle : trop nombreuses plutôt, trop serrées, trop copieuses. Il n'a eu qu'à puiser dans son tré- sor. Le choix résolu, il a fait la maquette, l'a modelée pro- gressivement; de proche en proche, la statue est née, et, comme Pygmalion, l'artiste, avec l'assistance d'une déesse, lui a donné la vie : Tu contemples Ta vivante Vénus, comme un païen fervent Contemplait sa déesse au profond de ses temples. Silencieux, troublé, tu te courbes devant Le pouvoir éternel des formes souveraines. Voici un sonnet qui est, à mon sens, une des meilleures pièces du volume, parce qu'une idée forte y est revêtue d'une forme heureuse et originale :