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276                   « PAUCA PAUCIS »

livre de Clair Tisseur, un art savant, un art profond et
consommé, qui m'a séduit de prime abord et, avant toute
chose, je m'expliquerai sur ce point.
    Déjà la préface est un morceau littéraire accompli. Cette
prose nette et originale, nerveuse, compréhensive, — Vol-
taire dans sa correspondance, — H y a longtemps que nous
la connaissons et que nous l'aimons. Tout est original ici :
un poète qui n'écrit pas pour le public; des vers qui au
lieu de naître, comme d'ordinaire, au matin de la vie, ne
 fleurissent que le soir. Et cela, qui plus est, par raison
démonstrative : « Je crois, dit l'auteur, qu'après avoir vécu
« fatalement dans la prose, il est bon de mourir dans
« la poésie. Le crépuscule de la vie est plus propice aux
« rêveries que le grand soleil ne laissant rien dans la
 « pénombre. »
    Tout est bien qui finit bien, mon cher poète, mais, quoi
que vous en disiez, je crois qu'il est bon de ne pas attendre
notre âge pour faire aux pieds de la Muse une première
génuflexion. Il faut se relever avec grâce et cela demande
quelque étude.

        Charités aux coeurs purs, écoutez mes prières,


s'écrie le poète en prenant sa lyre (oui, sa lyre; nous
sommes en pleine Grèce, et j'ai le droit de m'exprimer
 ainsi, sans qu'on se moque de moi). Comme elles sont
 douces, ses prières! Comme elles sont harmonieuses! Il est
clair qu'il parle aux Charités leur propre langue, le pur
 idiome d'Athènes, sans l'ombre d'un accent barbare, puis-
qu'elles l'ont si bien entendu et si complètement exaucé.
    Jeune, j'ai aimé passionnément André Chénier. Je ne
savais pas assez, le grec pour goûter dans leur langue Théo-