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72                 A TRAVERS LA KABYLIE

après le maréchal Bugeaud, disait, en parlant de l'œuvre de
l'archevêque d'Alger, que c'était la seule chose sérieuse qui
eût été faite pour l'assimilation des indigènes (p. 124).
    Il est permis d'espérer que les Pères blancs et les Sœurs
blanches continueront à réussir en Kabyliè. Mais avant que
l'éducation qu'ils donnent se généralise et transforme tout
un peuple, il faudra beaucoup de temps et de persévérance ;
il faudra surtout qu'elle ne soit pas entravée.
    Pour semer ainsi sans avoir l'espérance de récolter soi-
même, il faut ne pas avoir d'autre mobile que le sentiment
du devoir. Ce sentiment est rare ; beaucoup de réformateurs
n'agissent qu'en vue d'un succès immédiat; ils échouent le
plus souvent. On a beaucoup parlé d'une tentative de civi-
lisation des Kabyles faite, il y a quelques années, par un
personnage important de l'Algérie, auquel l'autorité, dit-on,
avait donné carte blanche. Son système consistait à con-
fondre l'apparence avec la réalité ; il appartenait sans doute
à cette école pour laquelle le Chinois se civilise rien qu'en
coupant sa queue et en endossant un habit noir. On peut
lire, p. 113 et suivantes, des détails intéressants sur cette
tentative. Citons seulement quelques lignes : « Satisfait des
premiers résultats de son système, M. S. invita le gouver-
neur général à venir les constater sur les lieux. Le gouver-
neur général accepta et se rendit en Kabylie. Trente jeunes
filles kabyles, élèves d'une école kabyle française, le reçurent
au chant de la Marseillaise. « Voilà l'assimilation, » s'écria
avec enthousiasme M. S. en les présentant. Puis il se mit
à célébrer les progrès que faisait chaque jour la civilisation
en Kabylie, et il en donna pour preuve, m'a certifié un
témoin de l'entretien, ce détail de toilette que les femmes
indigènes commençaient à se servir d'eau de Lubin. Le gou-
verneur général parut content et demanda un rapport sur