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318                       BIBLIOGRAPHIE.
huées, et que les enfants poursuivent à coups de pierres dans les
carrefoufs, peut-il davantage être pris pour ce Néron qui revient
vainqueur et triomphant des Jeux de la Grèce; sur le passage
duquel on répand le vin et le safran et qui marche suivi du
chœur des Augustans payés pour chanter, jour et nuit, seslouan-
ges et pour donner à sa beauté et à sa voix des surnoms divins?
   Trouverons-nous dans le récit du repas qui occupe la plus
grande partie de l'ouvrage ce que nous ne découvrons pas ail-
leurs ? Trimalcion en fait les frais. C'est une sorte de faux bon-
homme vieux et goutteux, fastueux et vantard, qui sent l'es-
clave enrichi.
   Pétrone, qui est un délicat, un gourmet en toutes choses,
« gula erudita » ou pour parler comme lui « gula ingeniosa »
doit mépriser cette race de parvenus si nombreux à Rome, dans
lesquels beaucoup de gens de nos jours auraient, sans doute, le
tort de se reconnaître, qui, par la grossièreté et les prétentions de
leur goût, profanent le luxe et gâtent le plaisir; ces orgueilleux,
avares par habitude, prodigues par vanité, qui paient trente
mille sesterces deux surmulets et qui condamnent au fouet l'es-
clave maladroit qui laisse tomber un vase d'argile ; ces fils inso-
lents dont les pères ont tourné la meule, qui n'ont d'autre
souci que de faire oublier leur origine et qui recherchent, dans
la foule des parasites, les flatteurs de leurs sottises et les
admirateurs de leur fortune. Cette description du banquet de
Trimalcion est parfaite de tous points.
   Mais ce n'est point là une de ces orgies qu'éclaire l'incendie
de Rome ; un de ces repas où Locuste prépare « la nourriture
divine » dont mourut Claude; où les convives perdent le goût
du vin dans le goût du'sang ; un de ces impromptus, un de ces
ballets pendant lesquels Néron, ivre des fureurs du Priapiscon,
rêve les amours de Pasiphaé et la paternité du Minotaure.
Si Pétrone eût voulu, d'autre part, dénoncer les prodigalités
insensées et ruineuses de César, il n'eût pas manqué de nous
dire d'où venaient l'or et l'argent qui servaient à les alimenter ;
comment Néron, descendu au métier de voleur de nuit, détrous-
sait les passants dans les rues et les dieux dans les temples ;