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448 RÉPONSE A M. CHAR VET. En contemplant ces deux vues, ajoutez, par la pensée, un toit aigu et des flèches a la cathédrale, et mettant de côté toutes les préoccupations d'un architecte dans son cabinet, dites-moi si l'effet heureux obtenu par nos deux artistes ne se trouve pas compromis? Si a la place de cette masse calme, bien composée, pleine de couleur locale, vous n'avez pas des angles criards, découpant mal à propos l'horizon, masquant les pittoresques détails de tous ces édifices fort peu aigus qui s'échelonnent sur les pentes1 Les flèches dans le paysage sont un peu comme les peupliers; on ne les emploie qu'avec beaucoup de modération, et l'on préfère les cimes arrondies et largement découpées du marronnier et du chêne. Discutons un peu maintenant l'origine des flèches et des toitures aiguës. Je réunis ces deux choses; elles ne peuvent guère aller l'une sans l'autre, étant la conséquence d'un même principe, qui est la tendance a la ligne verticale, et l'impor- tance donnée au faîtage qui est l'accessoire, concurremment au principal qui est le corps du bâtiment. Et d'où vient cette tendance, où prit-elle ses origines ? Ce n'est pas dans toutes les régions indifféremment, car les flèches que l'on rencon- tre accidentellement dans le midi ont tout autre caractère, de même que les plaines du midi, bien qu'elles soient plaines, ne ressemblent ni par la végétation ni par la teinte générale a celles du nord. Le clocher pyramidal d'Ainay n'est point une flèche analogue a celles de Rouen et de Strasbourg. Le système aigu est particulier au nord, au pays de Lan- gue d'oil, non de Langue d'oc, sauf quelques exceptions amenées par des causes inappréciables dans un coup d'œil aussi rapide. Ne pourrait-on pas hasarder cette autre conjecture, que si les pays de Langue d'oc l'ont repoussé, c'est que le sen- timent de l'architecture romaine y avait survécu a la chute de l'empire romain, et qu'ils ont dû préférer les souvenirs