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CONCOURS DE POÉSIE. 269 que le front de nos poètes ait méritées pour avoir traité des sujets nationaux. C'est un malheur assurément pour la poésie française. Vous chercheriez en vain, depuis ses origines connues,vquel- que poète qui autrefois se fût illustré, chez nous, a célébrer la patrie et ses traditions, et nous ne possédons même pas cette poésie anonyme des chants populaires, très-digne où d'admiration ou de respect, dont d'autres nations de l'Europe peuvent se vanter. A voir les richesses étrangères, combien pour nous de sujets d'être jaloux. Qu'avons-nous à compa- rer au poème du Cid le batailleur et aux romanceros es- pagnols, à l'heureux Camoëns idohltré de sa nation, aux Nie'belungen de l'Allemagne et aux chants patriotiques de Wœrner, a ce grand Shakespeare qui fut si Anglais dans le choix du sujet de ses drames et dans le fond des sentiments de sa poésie, et a cette Italie môme qui s'efforce aujourd'hui de se constituer, en nous laissant de l'autre côté des Alpes le gage d'amitié de la Savoie ? S'il est au monde un pays duquel ses poètes aient bien mérité (ne parlons pas de la France sous ce rapport), ce fut l'Italie et on doit dire l'Italie de tous les temps, celle de l'an- tiquité , celle du moyen-âge, celle de nos jours. Virgile chantant dans son immortelle épopée la gloire du Latium, Horace d'une âme si romaine pour peindre Caton ou Régulus, Lucain racontant la fortune chancelante entre Pompée et César, eurent des successeurs qui ne furent pas indignes d'eux, parfois pour le génie et toujours pour le culte dévotfé de la patrie italienne. Quel patriotisme passionné dans cet âpre exilé de Florence, le Dante, resté un poète national pour toute l'Italie ! Jamais bardes de la Péninsule, petits ou grands, ne furent en demeure de prêter une voix a ce sen- timent ardent et indigné, a cette sourde imprécation qui grondaient contre le joug de l'étranger. L'Italie à délivrer