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           FUITE ET ARRESTATION DE PAUL DIDIER.               349

 l'hospitalité de pauvres villageois dont un lui servit de guide
 pour franchir le col de la Coche, passage entre la Savoie et
 la vallée de l'Isère.
    C'est dans ces montagnes que trois des compagnons de Di-
 dier, proscrits comme lui, Dussert, Durif et Cousseaux, vin-
 rent le rejoindre.
    La première entrevue de ces hommes fut douloureuse ; le
malheur rend injuste : Dussert et Durif reprochèrent à Didier
 de les avoir entraînés dans une affaire dont l'issue avait été si
fatale; Cousseaux exhalait, en maugréant, sa colère et ses im-
précations.
    Ils étaient tous quatre réunis dans une cabane de l'un de
ces pauvres villages perdus sur les hauteurs des Alpes, le
Rivier-d'Allemont, à peu de distance du col de la Coche.
Cousseaux, Dussert et Durif étaient assis au coin d'une table ;
malgré ses soixante ans , malgré la blessure que lui avait
faite à la jambe la chute de son cheval tué sous lui, Didier
se promenait à grands pas dans la cabane.
    —«Vous nous avez trompés, disait Cousseaux à Didier, vous
nous avez trompés : Marie-Louise n'était pas à Eybens comme
vous me l'aviez fait accroire ; personne dans la ville n'a ré-
pondu au nom de l'Empereur... Vous nous avez trompés. »
    Didier, qu'une étrange préoccupation paraissait obséder,
et qui, depuis la rencontre qu'il avait faite de ses compagnons
d'infortune, subissait à chaque minute le supplice de leurs ré-
criminations et de leurs plaintes amères , Didier se redressa
tout à coup, et, se tournant vers Cousseaux : « Je vous ai
« trompés, dites-vous; mais la haine implacable que je porte
« aux Bourbons, celle que vous leur portez aussi, vous qu'ils
« ont chassé, vous qu'ils ont dégradé, vous à qui ils ont arra-
« ché le pain de votre famille ; celte haine est-elle donc un
« rêve, une illusion?... Je vous ai trompés! et quand bien
« même Napoléon n'eût pas été le nom de la victoire, la cause