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334 CORRESPONDANCE. Maintenant, suivrons-nous M. le professeur dans ses louables efforts pour défendre l'entière orthodoxie de M . Villemain? Nous en avons dit assez dans notre opuscule. Il y a une chose très sûre, c'est que les partis ne se méprennent pas facilement sur les hommes qui leur appartiennent, sur leurs amis ou leurs ennemis. Un infaillible instinct nous avertit en général de ce qui marche avec nous, ou loin de nous. Quelques apparences trompeuses ne sauraient nous en imposer fort longtemps. Or donc, les catholiques savent quels hommes sont les leurs, et sur qui ils peuvent compter, de même qu'un républicain sait à merveille et très vite s'il a en face un légitimiste ou un orléaniste. L'Église et les amis de l'Église ne demandent pas mieux que de voir dans la grande famille des membres nom- breux et dévoués; mais autant le Catholicisme éprouve ce vif desir, autant il s'afflige de voir que certains hommes, certains écrivains prétendent, en dépit de leur conscience, prendre place dans des rangs qu'ils méprisent. Que vous méconnaissiez la religion, c'est un malheur dont on vous plaindra ; mais que, malgré vos affections connues et vos allures assez significatives, il vous arrive de vous renouer à la foi chrétienne par mesure de prudence, voilà qui manque de noblesse et de sincérité. Il faut être pour ou contre, se placer hardiment daus un camp ou dans l'autre. Assurément, ceux qui ont à cœur la divinité et la grandeur de la religion, laissent percer les accents de foi et d'amour ; leur langage n'est pas équi- voque, et leurs écrits ne vont pas honteusement arracher çà et là quelque pierre de l'édifice; signaler les défauts de l'œuvre, s'il en é t a i t ; ni con- trister par une guerre de saillies, de malignes censures, de détails disposés dans un but spécial, une religion qui doit faire l'orgueil de leur vie, l'es- pérance de tous les jours que Dieu leur a comptés. Il n'est pas besoin d'une sagacité bien grande pour comprendre qu'il n'y ,a pas dans M . Villemain, dans ses écrits tout au moins, l'ensemble des con- victions qui peuvent faire un Catholique. D'autres que nous le savent, et l'é- pigraphe du livre de M. Collombet, empruntée au Courrier français, très peu suspecte d'orthodoxie, aurait pu émouvoir, tout aussi bien que ce livre même, le zèle chevaleresque de M. le professeur. M. Nicolas s'est tellement pris d'une belle passion pour M. le Grand- Maître, qu'il trouve que M. Collombet l'attaque avec un emportement furieux. Cependant, M . Collombet, à coup sûr, croyait avoir des mœurs plus douces que cela, mais que voulez-vous ? C'est par modération de langage et par ur- banité qu'on le traite d'emporté et de furieux. Il a bien d'autres torts à se reprocher. Dès le début de cette Réponse, \ on le met en parallèle avec Mgr. de Bonald, dont on le désigne comme le pi'é- ; curseur dans les aggressions contre le monopole de l'Université. M. Collombet \a fait son mandement, nous dit-on, avec une grâce charmante. M . Collombet V'st un l'véquc laïc, il se pose ; mais on observe qu'il n'a pas rencontre le rayon de miel sauvage qui nourrit l'ancien prophète CM désert, cl qui parait avoir coule sur les lèvres du Cardinal. Il se peut que M. Collombet n'ait pas mangé de miel sauvage ; nous ne pensons pas ([«'il soit humilié de se voir mis au-dessous du chef spirituel de ce diocèse, et combattu par les mêmes armes qui veulent at teindre un Cardinal de la sainte Église romaine ; M. Collombet se fait un honneur d'être assimilé, même de loin, dans cette croisade, à son supérieur et à sou é v è q u e , mais voilà tout. Il ne se pose nullement, et n'est pas homme à se draper en Spartacus. Si l'on veut prendre dans son sens le plus large ce mot d'ét'éque hic, M. Col- lombet aurait de quoi en être fier. Veiller aux intérêts de la seule chose, après tout, qui importe à l'homme, puisque c'est la seule qui doive le suivre