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334                         REVUE LYONNAISE

pour cela aucune prétention à la noblesse. Ceci peut suffire déjà à
 expliquer la particule de Christophle et celle de Théodore, à côté des
noms de leur père et de leur frère aîné qui en sont dépourvus.
    Vers le milieu du xvne siècle seulement, la particule, dans le lan-
gage civil, fut réservée exclusivement aux nobles. On peut en con-
clure que, bien avant cette époque, elle avait déjà, dans un certain
monde, le caractère d'une prétention nobiliaire. Il est évident que
tel était le cas de Christophle. La vanité humaine n'était pas moin-
dre autrefois qu'aujourd'hui, et les ouvrages de notre poète ne le
font pas précisément paraître comme un modèle de modestie.
D'autre part, si l'on songe que certaines fonctions publiques,
notamment celles de juge d'une cour royale et de premier consul
d'une ville, conféraient souvent la noblesse, il se peut que Christophle
se crût fondé à se dire noble, en se basant, soit sur les fonctions
qu'avaient exercées son père et son grand-oncle, soit sur l'anoblisse-
ment des Massabeuf, soit enfin sur la possession de quelque fief,
comme paraissent l'avoir fait ses neveux et petits-neveux, sous le
titre de sieurs de la Collange et de sieurs de la Lombardière. En le qua-
lifiant de noble, dans ses papiers de famille, il est bien probable que
Pierre Marcha donnait au poète une qualité, sinon parfaitement légi-
time, au moins généralement acceptée, et qui ne pouvait qu'être
agréable au parrain de sa fille. C'est le lieu de rappeler que les
classes étaient alors séparées par des démarcations beaucoup moins
précises qu'on ne le pense généralement. La noblesse comprenait
plusieurs catégories, depuis le vieux gentilhomme de race jusqu'à la
noblesse de robe et au bourgeois anobli. Ces derniers ne se distin-
guaient guère de la haute bourgeoisie, surtout quand celle-ci avait
pour elle la considération et la fortune. Les mariages, très fréquents
entre la noblesse inférieure et la bourgeoisie riche, contribuaient
encore à cette fusion des classes, et l'on comprend que les enfants
issus de ces mariages mixtes se considérassent tous comme nobles.
Les Gamon d'Annonay, à l'époque d'Achille et de Christophle, fai-
saient évidemment partie de cette classe un peu indécise qui formait
l'intermédiaire entre la haute bourgeoisie et la noblesse inférieure,
en attendant d'être définitivement admise dans cette dernière, ce