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380                       LA REVUE LYONNAISE

on suit pas à pas, dans leur carrière, les poètes. Le lecteur pénètre,
à votre suite, dans l'intimité de leurs sentiments. Votre récit, comme
un perpétuel commentaire, éclaire les passages qui pourraient, si
nous en ignorions l'idée génératrice, si nous ne connaissions pas les
circonstances qui les ont fait naître, sembler obscurs. Annoté de
cette sorte, M. Leconte de l'Isle lui-même deviendrait intelligible.
A combien plus forte raison vos frères, qui, sachant toujours se garer
de tous excès, estimant que

            Sans la langue, en un mot, l'auteur le plus divin
            Est toujours, quoi qu'il fasse, un méchant écrivain,

n'ont employé qu'un style exempt de scories, fuyant les truculences
de langage, comme on dit maintenant, montrant à tous que la pas-
sion, pour s'exprimer, peut fort bien se passer de la recherche pré-
tentieuse des mots, ou de la juxtaposition incohérente et antithé-
tique des termes !
   Mais vous nous avez fait un tort, Monsieur, dont je ne puis m'em-
pêcher de me plaindre amèrement. Que nous reste-t-il à dire sur
Jean et Barthélémy Tisseur? Quels rares épis trouverons-nous à
glaner, après que le champ a été dénudé par des moissonneurs aussi
attentifs que vous l'êtes? Non seulement vous avez fait, complète et
détaillée, la biographie de vos frères. Mais vous avez étudié, en
même temps que celle de leur caractère, la formation de leur talent
poétique, la genèse de leur manière, si je puis ainsi parler. Nous
connaissons leurs procédés de composition, les sources où ils pui-
saient l'inspiration. Vous nous montrez le fort et le faible de leurs
différents ouvrages. Vous épuisez la matière.
   Si nous ne pouvons critiquer, il nous reste du moins la ressource
d'admirei et de louer ces pièces dont quelques-unes, dans l'un comme
dans l'autre volume, sont de' véritables petits chefs-d'œuvre. Dieu
me garde de prétendre essayer ici cette chose toujours inutile et le
plus souvent absurde qu'on nomme un parallèle ! Différente fut la
nature de vos deux regrettés frères; mais chez tous deux, dans les
lignes que vous leur avez consacrées et dans leurs poésies, je retrouve
des traits identiques. La saine éducation familiale et chrétienne a