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            PEINTRE ET TAILLEUR D'HISTOIRES               335

sentiment de la proportion, il a été très sincère dans
l'expression, il a pris à Jean Cousin quelque chose de
sa grâce sévère et s'est élevé à un des premiers rangs.
Il a peu produit et il est encore aujourd'hui, chose
étrange, sans nom et sans histoire. Peu importe de
quel nom ou de quel surnom on a couvert son ano-
nymat (le maître à la capeline, le maître Thomas ( i ) ,
l'auteur des portraits de Simeoni ou celui des mois du
Calendrier historial, le graveur de Barthélémy Molin ou
celui de Benoist Rigaud). Cet inconnu, cet oublié,
qu'il faudra peut-être dédoubler, original sans avoir
ouvert une voie nouvelle ni apporté à ce petit art
des moyens nouveaux, sans avoir même eu sa propre
inspiration, a été, non pas seulement un artiste hardi,
mais un merveilleux ouvrier ; il a atteint à la perfec-
tion technique. Qu'il ait été seul ou qu'il faille voir
en lui deux ou trois personnages, il a été, nous le
répétons, autre que Bernard Salomon, plus soigneux,
plus varié, plus mesuré, plus fort, plus noble ; s'il
n'a pas eu son génie, il a eu plus de science.
   Le compositeur était peut-être un ; les graveurs ont
pu, par l'interprétation des dessins, donner à ceux-ci
des apparences très diverses, cela expliquerait ces incer-
titudes qu'il faut avouer. Mais si ce maître anonyme
a taillé ses histoires de sa main, il leur a imprimé
l'unité, la pureté et la finesse qui surprennent dans
plusieurs d'entre elles.

  Bernard Salomon n'avait pas seulement l'esprit ouvert


   (1) Le maître Thomas, « maistre peyntre et conducteur de
l'hœuvre » des décorations pour l'entrée de Charles IX en 1564.