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                        MOREL DE VOLEINE                           3O3

d'Or, pour les eaux fangeuses de la Seine et le très
médiocre fromage de Brie. Lorsque plus tard il vit dispa-
raître les bêches de la Saône et leurs illustres nageurs,
lorsque les campagnes furent dépoétisées par les omnibus
et les chalets anglois, lorsque les marchands de comestibles
et les pâtissiers se munirent d'huîtres et de brioches de
Paris, son découragement fut complet; il faillit abandonner
la rue Tramassac, pour se retirer en Algérie ou à Vernaison.
Mais un beau jour, il lut dans un journal, bien qu'il n'en lût
guère, qu'on avoit débaptisé la montée de Tire-Cul, la rue
de Y Enfant qui pisse et le quai Villeroy • il en eut une
 attaque dont les suites finirent par le mener à Lovasse,
 heureux d'y aller chrétiennement, sans être traîné dans un
corbillard et escorté par des fiacres. Pendant sa maladie, il
racontoit ses douleurs à un vieux prêtre, épave comme lui
 du temps passé, sachant à fond toutes les rubriques de la
liturgie lyonnoise et disant toujours, en parlant de l'arche-
vêque : Monseigneur le Primai de France. Violette mourut
pauvre, car il ne comprit jamais ce que c'étoit que les
affaires et donnoit beaucoup. En 1835, on expropria sa
maison (2) pour aligner la rue. Il plaça le capital chez un
notaire, ne trouvant plus de maison à acheter au prix de
son indemnité. Le notaire fit banqueroute, et il ne sauva
que la moitié de la somme, avec laquelle, à force de
privations, il put se soutenir, n'ayant pour commensal
qu'un barbet boiteux, le dernier des barbets et des amis
fidèles. »
   Dans ses    PETITES NOUVELLES LYONNAISES             et ses   FRAG-



  (2) M. Morel de Voleine possédait une maison, au coin de la rue
Grenette et du quai Saint-Antoine. Il dut la démolir et la rebâtir, pour
cause d'alignement.