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               LE PAGE DU BARON DES ADRETS.                79

dans son sauvage et affreux holocauste, elle-même elle
mit le feu aux cellules au moment où les Huguenots,
renversant les derniers obstacles, brisaient portes et
barrières et se ruaient sur la proie qu'ils convoitaient.
    A la vue de cet héroïque spectacle, de cet essaim de
vierges qui chantaient pendant que l'ardent incendie
qui les atteignait les délivrait de l'outrage, aux cris des
jeunes filles plus faibles que la douleur et l'effroi domi-
naient, les Huguenots reculèrent épouvantés. Jamais leurs
yeux n'avaient contemplé scène de désolation plus af-
freuse, pi us déchirante. Les pi us hardis hésitaient, les plus
endurcis pâlissaient ; ce meurtre volontaire, cette agonie
dans les ffammes, en leur rappelant la mort des pre-
miers chrétiens, les bêtes féroces dans le cirque et les
martyrs brûlant sous les yeux des empereurs, les terri-
fiait. Déjà le feu se communiquait aux voiles et aux
vêtements des religieuses qui tombaient évanouies. Sou-
dain, poussant de grands cris, les Huguenots passent à
travers la flamme et, lui arrachant ses victimes, cher*
chent à sauver quelques-uns de ces êtres humains
qu'elle commençait à dévorer.
    Une lueur d'humanité passa-t-elle dans ces âmes que
 le crime avait endurcies ? La Providence voulait-elle que
 l'holocauste ne fût pas entièrement consommé? Quoi
 qu'il en soit, un bandit m'enleva du brasier près duquel
j'étais tombée et, me portant hors des murs du couvent,
 me déposa évanouie et mourante contre un banc de
 bois qui me servit d'oreiller.
    La ville était à sac, le pillage était affreux. En ce mo-
 ment, le baron des Adrets me vit et, touché de ma jeu-
 nesse et de mon malheur, il me fit porter dans la maison