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116 CÔME, LE LAC ET SES BORDS. ques voix du premier étage. — Et on entend la perquisition furieuse ; les glaces et les meubles sont brisés, les portes ar- rachées, bruit de dévastation et de pillage qui alléchait la po- pulace sans la satisfaire. La terrible question : L'avez-vous trouvé! revint bien vite. — Non, répondit-on encore cette fois, du second étage. —Mais on ne désespérait point ; mais l'œuvre était ardemment poursuivie ; la populace charmait son attente par des propos atroces, par des rires bruyants, et répondait par des clameurs furibondes aux bruits intérieurs qui entretenaient l'espoir de la découverte. Enfin, du troi- sième étage, des combles et des lucarnes partit à la fois ce cri de triomphe : Nous l'avons trouvé !!! — Jetez-le! jetez-le ! répondit la populace. — En même temps, il se fit un grand vide et un grand silence sous les croisées, et... un homme précipité des combles du palais tomba sur le pavé. Cet homme était le ministre Prina qui, sanglant et brisé, vivait encore. Ce fut un grand sujet de joie : la fête était com- plète et n'était pas finie ! On le saisit par les cheveux, on le traîna par les pieds, respirant, encore, sur le pavé ; la po- pulace hurlante suivit la trace du sang jusqu'à ce que, au détour d'une rue, une grosse pierre écrasa la tête de l'infor- tuné, jusqu'à ce que son corps tomba en lambeaux, de sorte qu'il resta à peine un cadavre à ensevelir ! Le ministre Prina n'avait ni femme , ni enfani ; mais il avait un palais. On fondit de nouveau sur le palais déjà dé- vasté : en quelques heures, l'édifice fut anéanti, rasé jusqu'à sa base, avec un emportement féroce. Ainsi se fit, à Milan, une place nouvelle, dont le voyer n'avait pas réglé la forme et l'alignement. Après quoi la p o - pulace rentra dans son repos, laissant le vide et l'horreur après elle. Il ne resta plus qu'à nommer cette place impré- vue. Sans doute on ne voulut pas lui donner un nom signifi-